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Les orthos au Burkina !
9 août 2013

Mercredi : départ vers la suite de notre vie

Mercredi matin, c'est par une averse toute aussi longue (mais moins drue) que celle de la veille que la journée commence. Le mois d'août, comme nous l'avait expliqué Augustin, est en effet beaucoup pluvieux que celui de juillet, ce que nous avons pu constater de nous-même depuis le début du deuxième mois estival ! Ce mauvais temps n'entrave de toute façon en rien l'activité prévue : la préparation des bagages. Notre « salon » se transforme ainsi en bazar géant : il faut tout de même confectionner six valises (sans balance pour vérifier que le poids réglementaire n'est pas dépassé ! Ce qui donne naissance à quelques stratagèmes qui, bien qu’ingénieux, ne furent pas mis en pratique : « Un litre, ça fait un kilo, ok ? Donc si on vite dix bouteilles d'eau dans un seau, qu'on soupèse, et qu'on compare avec notre valise de cabine... »). La matinée (et un peu plus pour Hélène, fractionnant son rangement par petites touches dans la journée) se prête donc à cette activité, entrecoupée de lectures et discussions. Augustin nous confie ainsi son désir de ne pas nous voir partir, d'une manière qui lui est très personnelle et que nous avons du mal à recevoir, par incompréhension ou impossibilité d'entendre ces mots. Ce monologue presque dérangeant est interrompu par l'arrivée d'Antoine O, ce qui nous permet de retourner (nous échapper?) dans la chambre.

En début d'après-midi, nous recevons la visite des femmes, venues nous dire au revoir. Chacune semble émue (nous le sommes tout autant!), et c'est par de sincères étreintes que nous nous remercions mutuellement pour ce mois passé ensemble. Les femmes y rajoutent des bénédictions en mooré ("Wend naa koaba laafi" = que Dieu vous donne la santé ) et une grosse boîte de cacahuètes pour chacune de nous (Gwen avait reçu la même chose), en nous recommandant de la partager avec nos familles. Ces femmes sont poignantes, et en ont tellement fait pour nous ! La barrière de la langue, qui fut souvent un écueil pour nous, nous empêche de dire tout ce que nous avons sur le cœur. Mais les regards, les gestes et les sourires pallient cette difficulté : l'essentiel est transmis. Amina.

Lorsque notre taximan, Saïdou, arrive au centre avec une ponctualité fort appréciable (et appréciée), un essaim d'enfants insiste pour nous aider à porter nos valises, ce que nous devons parfois décliner avec gêne : le poids reste tout de même conséquent, malgré la disparition de tout le matériel apporté ! A peine le dernier sac entreposé dans le véhicule (Tetris, le retour), tout n'est que profusion de mains tendues, démonstrations d'amitié, bénédictions piochées dans le vocabulaire des adultes, agrippement de toute sorte (« donc là, tu me sautes dans les bras et tu ne veux plus me lâcher. Très bien, très bien ! »). Plusieurs enfants paraissent réellement peinés, mais, comme d'habitude, c'est la joie qui règne en maître sur leurs visages, dans leurs cris et mouvements. Nous sommes heureuses de pouvoir les revoir avant notre départ, même si nous déplorons l'absence de certains d'entre eux. Et, pendant que le taxi roule vers la sortie de Zongo, nous sourions à l'entente des « nassara, nassara ! » qui semblent nous saluer une dernière fois. Une première page se tourne...

Pour cause d'entassement de valises, nous sommes seulement trois dans la voiture : Antoine O et Augustin ont pris la décision de nous suivre en moto. Nous ne savons pas ce qu'il en sera d'Antoine S, dont nous n'avons pas de nouvelles depuis une brève entrevue à la fête de samedi. Nous en sommes un peu peinées, mais qu'y faire ?

Nous prenons le parti de faire une escale au grand Marina Marcket de la ville, dans l'espoir fondé d'y trouver de quoi nous fabriquer un petit pique-nique « à la française », et de dégoter la confiture de goyave introuvable la veille dans le modeste établissement de la même chaîne. Et c'est les bras chargés de victuailles (et des fameuses marmelades!) que nous nous précipitons dans notre refuge vert à quatre roues, en évitant habilement les vendeurs à la sauvette. Le repas restera cependant frugal : nos estomacs rétrécis supportent en effet très difficilement un « excès » (correspondant à la moitié de ce que nous pouvions auparavant ingurgiter dans notre pays hexagonal), habitués à manger peu, mais plus fréquemment. Quel bonheur toutefois de savourer du fromage et des biscuits français !

 Nous finissons par arriver devant l'aéroport, et retrouvons Justin qui nous attend au maquis d'en face, pour y siroter comme prévu un dernier verre en sa compagnie. Nous passons un moment très convivial avec lui, à parler de toute sorte de choses plus ou moins orthophoniques. Cette conversation se révèle enrichissante, notre sympathique « collègue » nous expliquant quelques manières de penser africaines qui nous aident à mieux comprendre certains événements survenus durant notre séjour. Justin dresse également un bilan très positif de notre venue au CEFISE et au Burkina, regrettant simplement que nous ayons été trop éloignées de Ouaga pour ne pas pouvoir plus souvent sortir le soir en ville avec lui et ses amis. La déception est partagée, mais la chose est faite, et opérer différemment aurait été trop compliqué : nous acceptons cette impossibilité avec philosophie ! Après nous être désaltérées (et avoir terminé le casse-croûte commencé dans le taxi), nous décidons de nous rendre à l'aéroport pour y attendre les garçons. Leur absence nous étonne quelque peu, malgré tout ce que nous avons pu observer du (très) relatif respect des horaires : il s'agit tout de même de notre départ. Nous traversons donc la route, gentiment aidées par Justin et ses deux bras (« On est trois, et on a six valises...Justin? »). Après une généreuse accolade et une chaude poignée de main, ce dernier rentre chez lui : l'attente commence pour nous. Il est en effet près de 21h, et nous décollons à 00h50. Une souriante burkinabè décide malgré elle de faire passer le temps plus vite, en nous proposant de « devenir copines ». Comprendre : échanger nos numéros de téléphone français, programmer un hypothétique rendez-vous en France (« je viendrai vous voir! ») et notre encore plus hypothétique come-back au Burkina. Gaie, bavarde, sociable : notre nouvelle « copine » de 25 ans et sa famille nous posent de joyeuses questions et répondent aux nôtres avec autant d'entrain. Encore une sensible différence d'avec la France, ou aborder un inconnu dans un lieu public paraît parfois complètement incongru. Le Burkina Faso a encore beaucoup à nous apprendre, même après un mois de séjour. Et d'autres déceptions à nous apporter également : nous ne reverrons ainsi pas nos hôtes avant notre décollage, ni ne recevrons le moindre appel ou message d'explications. Antoine O avait, il est vrai, fait mention d'une réunion prévue pour lui à 19h, mais nous avait assurées de son passage au maquis, si furtif soit-il, pour nous dire au revoir : nous suivre en moto lui paraissait logique. L'absence d'Antoine S, le discret du séjour, nous étonne moins, malgré les discours rassurants d'Antoine O sur l'immanquable rendez-vous à l'aéroport qui lui avait été donné. Quant à Augustin, nous ne l'avons pas recroisé depuis sa « déclaration », le jeune homme ayant trouvé refuge dans son bureau. Devons-nous interpréter son refus de venir par la blessure causée par notre départ ? Nous nous interrogeons un long moment sur leur comportement, d'autant que nous avons du temps à revendre pour ressasser notre forte déception après ce mois passé tous ensemble. Leur désir de garder le contact avec nous, clairement exprimé à de multiples reprises, rend notre incompréhension d'autant plus grande, et leur action s'en trouve encore plus obscure. Si notre séjour se termine sur cette note teintée d'amertume, nous savons toutefois que nous saurons nous souvenir de tous les moments positifs partagés avec les trois A, et que notre vision globale de ce voyage ne sera pas affectée.

 Après les multiples contrôles, l'enregistrement de nos bagages (« mettez vos statuettes en bronze et en bois dans vos valises de soute. » « des boucles d'oreille en bois, ça compte ? ») et les nôtres, les fouilles diverses (« Ouf, il a pas pris ma Vache qui Rit !!! »), nous nous retrouvons dans la salle d'embarquement, en présence d'une télévision. Le retour de la technologie...Encore un peu de patience, un début d'assoupissement, et nous voilà enfin dans l'avion. C'est alors que nous réalisons vraiment que nous rentrons en France, que notre séjour est bel et bien fini. Prise de conscience, avouons-le, accompagnée d'un certain soulagement, pour de multiples raisons. L'avion décolle, dans la nuit, et c'est avec bienveillance (et fatigue) que nous survolons le Burkina, notre terre d'accueil pour un mois. Que retirons-nous de ce séjour ? « Beaucoup  de choses, positives et négatives » semble être la seule réponse possible pour l'instant, en dépit de la frustration qu'elle pourra engendrer. Pour reprendre un de nos commentaires, certaines expériences ne se racontent pas, elles se vivent. Après deux escales, de multiples vérifications de passeport et cartes d'embarquement,un vrai petit-déjeuner presque incongru de par sa présence et les couverts qu'il propose, des heures de sommeil aérien, l'admiration d'une mer de nuages tourbillonnants, de multiples passages aux toilettes (Une cuvette ! Une chasse d'eau ! Du papier!!), des turbulences et trois démonstrations de consignes de sécurité (on saura le mettre, ce gilet de sauvetage!), nous atterrissons enfin à Paris Orly. Signe du destin : nos valises sont parmi les toutes premières à défiler sur le tapis roulant, nous épargnant l'éternelle angoisse du bagage perdu. Chargées de nos chariots, nous opérons donc un triomphal retour dans notre nouvelle ancienne réalité, accueillies par la famille d'Hélène et une Gwenaëlle fidèle au poste. Nous avons évidemment beaucoup pensé à notre vaillante camarade durant toute la durée de notre séjour à deux, et la revoir nous fait immensément plaisir. Le reste n'est que retrouvailles normales, dans toute leur joie, leurs étreintes et leur « je vais porter tes valises ». Scène banale de familles et amies se retrouvant après une longue absence, l'émotion pourtant est si forte pour ceux qui en sont les acteurs !

 Depuis, tout n'est que réacclimatation. Mais ici, le pluriel ne peut plus être employé (son utilisation était, nous le concédons, déjà précaire par certains endroits) : chacune de nous aura, c'est certain, l'occasion de décrire plus précisément ses sentiments quant au séjour, au retour et à ce qui en découlera, que cela soit publiquement, donc par l'intermédiaire de ce blog, ou de façon plus personnelle. Si l'essentiel de ce voyage (du moins, nous l'espérons!) a été consigné ici, nos lecteurs se douteront bien que tout n'a pas pu être écrit, que cela soit par pudeur, manque de temps, difficulté de trouver les mots ou impossibilité toute simple ! De même, comment décrire trois façons de ressentir, de voir, d'analyser ? Si nous ne reviendrons pas sur chaque journée en détail, ce blog n'est cependant pas encore terminé. Tout est maintenant dans nos têtes, à nous de mettre tout cela en mots...

 Et même si cela pourra sembler redondant et inutile, nous souhaiterions encore une fois remercier toutes les personnes ayant pris part à ce projet, de près comme de loin, et vous assurer que tous vos commentaires, même si nous n'avons parfois pas pu les lire tout de suite, nous ont extrêmement touchées, amusées ou été utiles. Merci de votre enthousiasme, merci de nous savoir suivies tout au long de ces pages, de ces photos et de nos « perles », merci de vos réactions, merci d'être partis virtuellement avec nous.

 Bonne suite et fin d'été à tous, et veuillez recevoir les chaleureuses salutations des trois ouagaphonistes ! (Mieux vaut tard que jamais pour trouver ce néologisme aux airs de mot-valise)

 Au plaisir de se retrouver !

 

Bilfou !

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Commentaires
Z
Vous revoilà sur le sol français :<br /> <br /> Depuis son retour, nous avons eu quelques échanges avec Gwenaëlle. Nous avons suivi votre séjour et vous remercions pour l'ensemble de votre projet qui semble s'être déroulé selon vos prévisions. Vous êtes probablement fatiguées et dans une période de flottement et de réadaptation. Bon courage !<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Nous vous laissons le temps de rentrer et espérons vous avoir prochainement au téléphone.<br /> <br /> <br /> <br /> Nous vous embrassons.<br /> <br /> Jean-Marc et Anne-Marie Bruel
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