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Les orthos au Burkina !

30 novembre 2013

Mieux vaut tard que jamais

Une amie m'a demandé il n'y a pas longtemps si, un jour, le fameux article "bilan de l'Afrique" apparaîtrait sur le blog.  La question était légitime, notre journal virtuel ayant été annoncé comme non terminé ! De plus, les nouveaux projets d'Ortho'Go 2014 étant actuellement en train de voir le jour, les souvenirs sont forcément ravivés...

Alors voici mon propre bilan, à moi, Marion. Mes camarades viendront poster elles-mêmes leur témoignage si elles en ont le besoin, l'envie, et surtout le temps !

Malgré les mois qui ont passé depuis notre retour, je reste encore à ce jour mitigée quant à mon expérience africaine. Comme je l'avais prévu, je pense régulièrement à mon séjour lors de petites actions du quotidien : faire chauffer un plat au micro-onde, me servir un verre d'eau au robinet, tirer la chasse des toilettes et me rendre compte du "gaspillage" de ce liquide vital, aller chez le docteur et avoir la chance d'être remboursée, etc. Ce n'est pas omniprésent, ce n'est pas étouffant, mais c'est là, c'est en moi. Pour autant, je ne suis pas devenue de ces personnes admirables qui changent le monde de par leur implication dans des associations actives, de par un changement radical de leur mode de vie. Peu de temps après notre retour, j'ai pu avoir Jean-Marc Bruel de Zoodo au téléphone, qui m'a appris que Zongo avait été touché par une vague de paludisme, que beaucoup de morts étaient à déplorer, surtout des femmes. Aminata, Mamounata et les autres...Cela m'avait beaucoup touchée. Ne pas savoir ce qu'il en était rééllement sur place n'était pas facile. Il m'arrive d'ailleurs souvent de me demander, à tel ou tel moment de la journée, ce que les habitants de Zongo sont en train de faire, si les rééducations de Justin se passent comme il le souhaite. J'ai d'ailleurs gardé contact avec celui-ci, bien que nos envois de mail soient plutôt sporadiques. 

En cette période de fêtes de fin d'année, il m'arrive, comme tout le monde bien sûr, de calculer au mieux mon budget concernant les cadeaux de Noël et tout le reste, de  me dire que mon compte en banque mériterait d'être renfloué. Et, dans ces cas-là, mes pensées vont vers le Burkina : je nous revois expliquer aux trois A qu'en tant qu'étudiantes, nous ne gagnons par d'argent et ne sommes pas riches. Pourtant, par rapport à eux, nous paraissons tous millionnaires ! Il en va de même lorsque je m'achète une babiole inutile : cela reste un luxe, quoi qu'on en dise, de pouvoir acquérir des objets qui seront utilisés à des fins décoratives ou de loisir, voire qui ne serviront à rien de particulier. Les burkinabè ne sont pas matérialistes, pour la simple et bonne raison qu'il n'ont pas la possibilité de l'être.

Mais, comme je le disais, ces pensées forment des touches fugaces de mon existence, des brins de concience tantôt quotidiens, tantôt hebdomadaires, aussi imprévisibles qu'éphémères. Non, je n'ai pas parrainé d'enfant de Zongo, non, je ne dis pas aux gens qu'il faut envoyer des dons en Afrique car la situation y est critique, et non, je ne le fais pas moi-même. Oui, j'aimerais changer les choses, mais pour autant, je ne sais pas si j'en ai la force, la volonté. Car l'envie et la volonté sont deux choses bien distinctes, c'est indiscutable.  Et, si j'aimerais que ce monde change, c'est d'abord sur ma vie, qu'égoïstement   (ou humainement ?) je me base. Devenir orthophoniste est mon but cette année, fonder une famille en est un autre qui m'est cher.

Néanmoins, si l'hypothèse d'un autre voyage en Afrique reste pour le moins très...hypothétique (quelle redondance !), je suis par contre certaine que, si cela se faisait, cela ne serait pas en tant que "touriste", pas pour ma part du moins. Partir oui, mais solidairement, humanitairement. Humainement.

J'ai retrouvé un texte que j'avais écrit lors de notre séjour, peu avant notre départ, et, après (très) mûre réflexion, j'ai décidé de le poster ici, car il fait partie de ce voyage et aidera le lecteur à comprendre mon état d'esprit.  Je ne sais même pas s'il y aura encore des personnes pour lire cela, alors...!

 

"Est-ce en partant d’ici que je comprendrai véritablement ce que ce voyage m’a apporté ? Est-ce qu’en France, tout ceci me manquera au point de me rendre nostalgique ? Parfois j’ai peur de ne pas déchiffrer le sens de ce que j’ai vu et vécu en ces lieux, et de ne jamais pouvoir le faire. Je me dis que j’ai été folle de venir en Afrique, et que cela ne changera rien. Que je serai toujours la même, que le cours de leurs vies ne s’en trouvera pas dévié. Pourtant je suis déjà différente, et les gens que j’ai rencontrés ici le sont aussi. Nous avons tous évolué, par tout ce que nous nous sommes mutuellement transmis. Ces gens ne m’oublieront pas, pas plus que leurs visages ne s’effaceront de ma mémoire.

J’ai peur de redevenir celle que j’étais à mon arrivée ici, peur de ne jamais tirer les leçons de ce que j’ai engrangé durant ces dizaines de jours. Je voudrais devenir quelqu’un de meilleur, ne pas me laisser engloutir par le confort occidental et toute ses profusions de modernité, nourritures, et gadgets en tout genre. Je ne veux pas perdre de vue la vraie valeur de la vie, et apprendre à profiter toujours plus de cette dernière, sans râler pour un rien, sans me créer de prises de tête inutiles, sans impatience destructrice ou incapacité à résister aux frustrations. Je veux pouvoir accepter les choses avec philosophie, ne pas me braquer à la moindre contrariété, ne pas me laisser envahir par de la jalousie qui n’a pas lieu d’être, accepter de partager sans rechigner. Je veux utiliser au mieux les avantages de ma naissance sans en être dépendante, je veux faire honneur à ces gens qui donnent tout en n’ayant rien, qui cachent leur précarité sous des sourires francs et chaleureux, qui vivent pleinement quand leurs proches meurent de faim ou de maladies, qui répondent toujours que tout va bien tant que la santé est là. Je voudrais pouvoir me rendre compte chaque jour de la chance que j’ai, et laisser ce voyage réorganiser ma manière de voir les choses : apprendre à lâcher prise. Je voudrais fonder une famille, me marier et avoir des enfants avec qui partager ces valeurs.

Je voudrais avoir la force de revenir un jour, et ne pas m’enfermer dans ce cocon protecteur qu’est la France. Je voudrais hurler à l’Europe que je la hais de ne pas pouvoir aider les pays les plus démunis. Je voudrais cracher mon mépris à ceux qui ferment les yeux sur ce qui se passe ailleurs et qui se voilent la face. Je voudrais gueuler au monde que tout cela est injuste. Je voudrais exprimer à quelqu’un le dégoût que j’ai de désirer au plus tôt rentrer chez moi pour fuir la misère, la saleté, les carences, les manques, l’omniprésence dérangeante de ceux qui ne possèdent rien, les privations, le regard presque accusateur des adolescentes transpirantes qui poussent leur lourd tonneau d’eau sous le soleil de plomb et qui semblent parler par leurs yeux : « tu pourrais être à ma place, nassara, tu aurais pu naître ici. Tu as juste eu plus de chance que moi à la loterie, moi j’ai tiré le lot de consolation. ».

Quelle consolation ? Celle d’être vivante et esclave de sa propre vie ? Celle d’avoir encore la force de tirer ces litres de liquide sur plusieurs kilomètres chaque jour ? Celle d’avoir peur de la mort tout en souhaitant ardemment qu’elle arrive vite ?

Antoine et Augustin nous répètent souvent de rester ici, et de ne repartir en France qu’en vacances. Je sais bien sûr que ce n’est pas possible (« mais tout est possible, Poko »), que je dois prendre cet avion mercredi, que je dois retrouver les miens, que je deviendrai orthophoniste, que mon foyer se retrouvera certainement dans mon pays natal. Je sais que ma vie n’est pas ici.

Mais putain, qui a donc décrété que la leur devait l’être ?

 

Et rester positif, pourtant. Ne pas se laisser bouffer par ce voyage et en revenir plus forte pour les gens que j’aime. Et pour moi, aussi.

Bien sûr que ce séjour ne sera pas vain, ne serait-ce par toutes les rencontres inoubliables qu’il m’a permises. Ces personnes que je ne reverrai peut-être jamais m’ont offert quelque chose d’infiniment plus précieux que tout bien matériel : un état d’esprit, qu’il me faudra apprivoiser, adopter, et appliquer durablement. Et qui me donne l’envie inébranlable de bâtir ma vie en tenant la personne que j’aime par la main, en me donnant les moyens de nous réaliser dans la confiance : garder la foi en l’avenir, sans s’appesantir, et profiter pleinement de tous les moments qui nous seront offerts.

Bien sûr, je ne deviendrai pas parfaite. Mais je tenterai coûte que coûte d’améliorer ce qui peut l’être. Pour moi, pour mes amis burkinabè, pour mes proches. Que les seconds soit fiers de ce que les premiers ont fait de moi.

Le Burkina Faso ne sera plus simplement un point sur une carte, désormais."

 

Voilà. Ce que j'en retire, c'est que même si les changements ne sont parfois pas flagrants, ce genre d'expérience fait forcément réfléchir, et nos vies en sont inéluctablement modifiées, que cela soit de manière infime ou plus spectaculaire. Certaines personnes choisissent de partir encore plus loin, de tendre toujours plus la main. D'autres se renferment dans leur quotidien, culpabilisant parfois en prenant une douche ou en entendant les actualités désastreuses de certains pays. Et cette "liste" n'est bien sûr pas exhaustive : autant de comportements que de voyageurs, car nous avons tous une manière différente d'appréhender les choses sur place ou à notre retour. Et nous avons la chance d'avoir le choix, le choix de faire ce que nous voulons de cette expérience, le choix de l'utiliser au quotidien. Nous avons eu la chance de partir, aussi. Quand j'y pense, malgré tout, nous avons de la chance. Et j'aime pouvoir m'en rendre compte. Car mine de rien, cela me permet de m'émerveiller toujours plus pour des broutilles, cela me permet d'être heureuse. Car je le suis (au cas où quelqu'un en douterait !).

Donc non, je ne suis certainement pas devenue parfaite. Je ne sais pas non plus si je suis devenue meilleure, mais j'essaie. Je ne sais pas non plus si écrire cet article servira à quelque chose, mais maintenant, en tout cas, c'est fait !

Je finirai par parler d'une vidéo que Gwen a réalisée, et qui résume très bien notre voyage, ce que nous avons vu et vécu. Si par hasard, quelqu'un lit ce message, et si, par un plus grand hasard encore, il ne connaît pas cette vidéo, je la lui recommande chaudement !  http://www.youtube.com/watch?v=1eklON0LHXQ

 

Bref, encore un pavé sur ce blog, peut-être le dernier, cette fois. La relève de Ouagaphonie est en marche, car le projet tend à être repris cette année par cinq nouvelles membres d'Ortho'Go. J'espère que ce voyage leur apportera autant que ce qu'il a pu m'apporter et, mais j'en suis sûre, qu'elle sauront en retirer tout le bénéfice possible pour la suite de leur vie.

Et peut-être que, comme moi, elles rêveront parfois en mooré, comme cela m'est arrivé plusieurs nuits après mon retour en France, et comme cela m'arrive encore aujourd'hui.

 

Marion

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9 août 2013

Mercredi : départ vers la suite de notre vie

Mercredi matin, c'est par une averse toute aussi longue (mais moins drue) que celle de la veille que la journée commence. Le mois d'août, comme nous l'avait expliqué Augustin, est en effet beaucoup pluvieux que celui de juillet, ce que nous avons pu constater de nous-même depuis le début du deuxième mois estival ! Ce mauvais temps n'entrave de toute façon en rien l'activité prévue : la préparation des bagages. Notre « salon » se transforme ainsi en bazar géant : il faut tout de même confectionner six valises (sans balance pour vérifier que le poids réglementaire n'est pas dépassé ! Ce qui donne naissance à quelques stratagèmes qui, bien qu’ingénieux, ne furent pas mis en pratique : « Un litre, ça fait un kilo, ok ? Donc si on vite dix bouteilles d'eau dans un seau, qu'on soupèse, et qu'on compare avec notre valise de cabine... »). La matinée (et un peu plus pour Hélène, fractionnant son rangement par petites touches dans la journée) se prête donc à cette activité, entrecoupée de lectures et discussions. Augustin nous confie ainsi son désir de ne pas nous voir partir, d'une manière qui lui est très personnelle et que nous avons du mal à recevoir, par incompréhension ou impossibilité d'entendre ces mots. Ce monologue presque dérangeant est interrompu par l'arrivée d'Antoine O, ce qui nous permet de retourner (nous échapper?) dans la chambre.

En début d'après-midi, nous recevons la visite des femmes, venues nous dire au revoir. Chacune semble émue (nous le sommes tout autant!), et c'est par de sincères étreintes que nous nous remercions mutuellement pour ce mois passé ensemble. Les femmes y rajoutent des bénédictions en mooré ("Wend naa koaba laafi" = que Dieu vous donne la santé ) et une grosse boîte de cacahuètes pour chacune de nous (Gwen avait reçu la même chose), en nous recommandant de la partager avec nos familles. Ces femmes sont poignantes, et en ont tellement fait pour nous ! La barrière de la langue, qui fut souvent un écueil pour nous, nous empêche de dire tout ce que nous avons sur le cœur. Mais les regards, les gestes et les sourires pallient cette difficulté : l'essentiel est transmis. Amina.

Lorsque notre taximan, Saïdou, arrive au centre avec une ponctualité fort appréciable (et appréciée), un essaim d'enfants insiste pour nous aider à porter nos valises, ce que nous devons parfois décliner avec gêne : le poids reste tout de même conséquent, malgré la disparition de tout le matériel apporté ! A peine le dernier sac entreposé dans le véhicule (Tetris, le retour), tout n'est que profusion de mains tendues, démonstrations d'amitié, bénédictions piochées dans le vocabulaire des adultes, agrippement de toute sorte (« donc là, tu me sautes dans les bras et tu ne veux plus me lâcher. Très bien, très bien ! »). Plusieurs enfants paraissent réellement peinés, mais, comme d'habitude, c'est la joie qui règne en maître sur leurs visages, dans leurs cris et mouvements. Nous sommes heureuses de pouvoir les revoir avant notre départ, même si nous déplorons l'absence de certains d'entre eux. Et, pendant que le taxi roule vers la sortie de Zongo, nous sourions à l'entente des « nassara, nassara ! » qui semblent nous saluer une dernière fois. Une première page se tourne...

Pour cause d'entassement de valises, nous sommes seulement trois dans la voiture : Antoine O et Augustin ont pris la décision de nous suivre en moto. Nous ne savons pas ce qu'il en sera d'Antoine S, dont nous n'avons pas de nouvelles depuis une brève entrevue à la fête de samedi. Nous en sommes un peu peinées, mais qu'y faire ?

Nous prenons le parti de faire une escale au grand Marina Marcket de la ville, dans l'espoir fondé d'y trouver de quoi nous fabriquer un petit pique-nique « à la française », et de dégoter la confiture de goyave introuvable la veille dans le modeste établissement de la même chaîne. Et c'est les bras chargés de victuailles (et des fameuses marmelades!) que nous nous précipitons dans notre refuge vert à quatre roues, en évitant habilement les vendeurs à la sauvette. Le repas restera cependant frugal : nos estomacs rétrécis supportent en effet très difficilement un « excès » (correspondant à la moitié de ce que nous pouvions auparavant ingurgiter dans notre pays hexagonal), habitués à manger peu, mais plus fréquemment. Quel bonheur toutefois de savourer du fromage et des biscuits français !

 Nous finissons par arriver devant l'aéroport, et retrouvons Justin qui nous attend au maquis d'en face, pour y siroter comme prévu un dernier verre en sa compagnie. Nous passons un moment très convivial avec lui, à parler de toute sorte de choses plus ou moins orthophoniques. Cette conversation se révèle enrichissante, notre sympathique « collègue » nous expliquant quelques manières de penser africaines qui nous aident à mieux comprendre certains événements survenus durant notre séjour. Justin dresse également un bilan très positif de notre venue au CEFISE et au Burkina, regrettant simplement que nous ayons été trop éloignées de Ouaga pour ne pas pouvoir plus souvent sortir le soir en ville avec lui et ses amis. La déception est partagée, mais la chose est faite, et opérer différemment aurait été trop compliqué : nous acceptons cette impossibilité avec philosophie ! Après nous être désaltérées (et avoir terminé le casse-croûte commencé dans le taxi), nous décidons de nous rendre à l'aéroport pour y attendre les garçons. Leur absence nous étonne quelque peu, malgré tout ce que nous avons pu observer du (très) relatif respect des horaires : il s'agit tout de même de notre départ. Nous traversons donc la route, gentiment aidées par Justin et ses deux bras (« On est trois, et on a six valises...Justin? »). Après une généreuse accolade et une chaude poignée de main, ce dernier rentre chez lui : l'attente commence pour nous. Il est en effet près de 21h, et nous décollons à 00h50. Une souriante burkinabè décide malgré elle de faire passer le temps plus vite, en nous proposant de « devenir copines ». Comprendre : échanger nos numéros de téléphone français, programmer un hypothétique rendez-vous en France (« je viendrai vous voir! ») et notre encore plus hypothétique come-back au Burkina. Gaie, bavarde, sociable : notre nouvelle « copine » de 25 ans et sa famille nous posent de joyeuses questions et répondent aux nôtres avec autant d'entrain. Encore une sensible différence d'avec la France, ou aborder un inconnu dans un lieu public paraît parfois complètement incongru. Le Burkina Faso a encore beaucoup à nous apprendre, même après un mois de séjour. Et d'autres déceptions à nous apporter également : nous ne reverrons ainsi pas nos hôtes avant notre décollage, ni ne recevrons le moindre appel ou message d'explications. Antoine O avait, il est vrai, fait mention d'une réunion prévue pour lui à 19h, mais nous avait assurées de son passage au maquis, si furtif soit-il, pour nous dire au revoir : nous suivre en moto lui paraissait logique. L'absence d'Antoine S, le discret du séjour, nous étonne moins, malgré les discours rassurants d'Antoine O sur l'immanquable rendez-vous à l'aéroport qui lui avait été donné. Quant à Augustin, nous ne l'avons pas recroisé depuis sa « déclaration », le jeune homme ayant trouvé refuge dans son bureau. Devons-nous interpréter son refus de venir par la blessure causée par notre départ ? Nous nous interrogeons un long moment sur leur comportement, d'autant que nous avons du temps à revendre pour ressasser notre forte déception après ce mois passé tous ensemble. Leur désir de garder le contact avec nous, clairement exprimé à de multiples reprises, rend notre incompréhension d'autant plus grande, et leur action s'en trouve encore plus obscure. Si notre séjour se termine sur cette note teintée d'amertume, nous savons toutefois que nous saurons nous souvenir de tous les moments positifs partagés avec les trois A, et que notre vision globale de ce voyage ne sera pas affectée.

 Après les multiples contrôles, l'enregistrement de nos bagages (« mettez vos statuettes en bronze et en bois dans vos valises de soute. » « des boucles d'oreille en bois, ça compte ? ») et les nôtres, les fouilles diverses (« Ouf, il a pas pris ma Vache qui Rit !!! »), nous nous retrouvons dans la salle d'embarquement, en présence d'une télévision. Le retour de la technologie...Encore un peu de patience, un début d'assoupissement, et nous voilà enfin dans l'avion. C'est alors que nous réalisons vraiment que nous rentrons en France, que notre séjour est bel et bien fini. Prise de conscience, avouons-le, accompagnée d'un certain soulagement, pour de multiples raisons. L'avion décolle, dans la nuit, et c'est avec bienveillance (et fatigue) que nous survolons le Burkina, notre terre d'accueil pour un mois. Que retirons-nous de ce séjour ? « Beaucoup  de choses, positives et négatives » semble être la seule réponse possible pour l'instant, en dépit de la frustration qu'elle pourra engendrer. Pour reprendre un de nos commentaires, certaines expériences ne se racontent pas, elles se vivent. Après deux escales, de multiples vérifications de passeport et cartes d'embarquement,un vrai petit-déjeuner presque incongru de par sa présence et les couverts qu'il propose, des heures de sommeil aérien, l'admiration d'une mer de nuages tourbillonnants, de multiples passages aux toilettes (Une cuvette ! Une chasse d'eau ! Du papier!!), des turbulences et trois démonstrations de consignes de sécurité (on saura le mettre, ce gilet de sauvetage!), nous atterrissons enfin à Paris Orly. Signe du destin : nos valises sont parmi les toutes premières à défiler sur le tapis roulant, nous épargnant l'éternelle angoisse du bagage perdu. Chargées de nos chariots, nous opérons donc un triomphal retour dans notre nouvelle ancienne réalité, accueillies par la famille d'Hélène et une Gwenaëlle fidèle au poste. Nous avons évidemment beaucoup pensé à notre vaillante camarade durant toute la durée de notre séjour à deux, et la revoir nous fait immensément plaisir. Le reste n'est que retrouvailles normales, dans toute leur joie, leurs étreintes et leur « je vais porter tes valises ». Scène banale de familles et amies se retrouvant après une longue absence, l'émotion pourtant est si forte pour ceux qui en sont les acteurs !

 Depuis, tout n'est que réacclimatation. Mais ici, le pluriel ne peut plus être employé (son utilisation était, nous le concédons, déjà précaire par certains endroits) : chacune de nous aura, c'est certain, l'occasion de décrire plus précisément ses sentiments quant au séjour, au retour et à ce qui en découlera, que cela soit publiquement, donc par l'intermédiaire de ce blog, ou de façon plus personnelle. Si l'essentiel de ce voyage (du moins, nous l'espérons!) a été consigné ici, nos lecteurs se douteront bien que tout n'a pas pu être écrit, que cela soit par pudeur, manque de temps, difficulté de trouver les mots ou impossibilité toute simple ! De même, comment décrire trois façons de ressentir, de voir, d'analyser ? Si nous ne reviendrons pas sur chaque journée en détail, ce blog n'est cependant pas encore terminé. Tout est maintenant dans nos têtes, à nous de mettre tout cela en mots...

 Et même si cela pourra sembler redondant et inutile, nous souhaiterions encore une fois remercier toutes les personnes ayant pris part à ce projet, de près comme de loin, et vous assurer que tous vos commentaires, même si nous n'avons parfois pas pu les lire tout de suite, nous ont extrêmement touchées, amusées ou été utiles. Merci de votre enthousiasme, merci de nous savoir suivies tout au long de ces pages, de ces photos et de nos « perles », merci de vos réactions, merci d'être partis virtuellement avec nous.

 Bonne suite et fin d'été à tous, et veuillez recevoir les chaleureuses salutations des trois ouagaphonistes ! (Mieux vaut tard que jamais pour trouver ce néologisme aux airs de mot-valise)

 Au plaisir de se retrouver !

 

Bilfou !

8 août 2013

Atterrissage réussi, bienvenue dans une nouvelle ancienne réalité !

Et aprés nos dernières aventures, voici donc, pour ceux qui ne le sauraient pas, une annonce officielle de notre retour français ! Tout s'est bien passé, sans aucun retard mais avec quelques turbulences dans l'avion, qui ont valu quelques mains moites à certaines d'entre nous (oui, bon, je plaide coupable). Le résumé de notre dernière journée arrive demain : certes, un peu après la bataille, mais ce blog ne serait pas complet sans le descriptif de ce mercredi très particulier. Pour patienter, quelques menues photo de Fada ont été ajoutées, ainsi que celles, pour ceux à qui cela aurait échappé, de notre week-end à Nazinga. Amoureux des éléphants, c'est pour vous ! 

En ce qui nous concerne, l'heure est à la réacclimatation, au repos, aux retrouvailles, à la réconciliation avec une hygiène corporelle décente et...au sacrifice de tous les paquets de riz croisés sur notre chemin !

8 août 2013

Marchons sur des oeufs, et surtout...mangeons-les !

Samedi matin, à notre retour du cyber et du Centre d’Artisanat, le Hangar et la cour peinent à contenir la masse de femmes, enfants, marmites, tonneaux et autres ustensiles indispensables aux préparatifs festifs. A peine avons-nous le temps de ranger nos achats, et nous voici emportées par une vague de salutations chaleureuses, mains à serrer, retrouvailles complices. Nous nous retrouvons enrôlées à la confection de sachet de jus de bissap, mais il est clair que nous n’avons pas le coup de main expert de nos instructrices ! Nous nous réfugions peu de temps après dans la chambre, en quête d’un peu de repos. L’arrivée du tailleur nous tire de notre léthargie : nos costumes traditionnels sont prêts ! Nous les enfilons avec scepticisme : le tissu paraît fort épais, or la température extérieure est déjà plus qu’appréciable. Ces doutes sont néanmoins balayés par les réactions de tous nos amis, hommes, femmes et enfants, à notre vue : que du positif ! Les hommes miment le coup de foudre, tandis que nos complices du sexe opposé lancent d’éclatants « c’est joliiiiii ! » sur un ton très particulier que nous imiterons sur votre demande (à noter, des antériorisations propres au Burkina, faisant prononcer « c’est zoliiiii » ou transformant le « ch » en « s » : rééducation orthophonique en perspective !). Bref, c’est un succès, qui se paiera par l’impression de mariner dans son jus tout l’après-midi : il faut souffrir pour être belle ! L’assemblée tombe d’accord sur le fait que nous sommes de vraies burkinabè, et qu’à ce titre, Hélène doit recevoir un nom mooré (Marion n’étant plus appelée que Poko par toutes les personnes la reconnaissant). C’est ainsi qu’il lui est fait cadeau du patronyme « Tene », qui, bien que signifiant « lundi », se veut un nom très traditionnel. Sitôt proposé, sitôt adopté ! Du moins par l’assemblée : « Tene » ne semble pas éprouver sur le coup une joie farouche quant au fait d’être associée à un jour de la semaine.

Ceci étant fait, nous découvrons que l’immense marmite trônant fièrement au centre du cercle des actives cuisinières cache 50 kg de riz achetés le matin même, les légumes cuits et le poisson étant disposés dans deux autres récipients plus petits. Les travailleuses n’ont pas chômé, le repas s’annonce pantagruélique. Les enfants attendront toutefois le soir pour le déguster, à même le sol du Hangar, répartis en plusieurs petits groupes encerclant chacun un plat bien garni. Les adultes, dont nous, pourront eux en profiter avant (c’est-à-dire vers 15h). Les sachets de bissap seront distribués à tous les enfants dès le dernier grain de riz avalé : il s’agit d’une rafraichissante boisson un peu âpre à l’aspect de vin rouge, au goût particulier (mais délicieux) ne lui ôtant en rien sa qualité désaltérante !

Après ces agapes, place à la danse ! Il est intéressant de constater que les « shows » des deux nassara se déhanchant sur la macarena ou mimant sans en omettre une parole les chansons de Céline Dion, Francis Cabrel ou Marc Lavoine ont toujours autant de succès : les enfants s’asseyent sagement autour de l’attraction, et même les femmes abandonnent leurs activités pour venir apprécier le spectacle. C’est ensuite aux enfants de nous dévoiler le « ballet » composé en notre honneur : chansons et chorégraphies associées, pour notre plus grand plaisir ! Chacun veut participer, ce qui finit par créer un indicible chaos. Les femmes reprennent donc les choses en main, et commencent à leur tour une démonstration de leurs danses (« on bouge les fesses ! »). La soirée est hélas écourtée par la menace d’une pluie imminente : éclairs, prémices d’une tempête de sable…Beaucoup de participantes se voient contraintes de quitter la fête. Nous restons donc avec les enfants, qui finissent également par se disperser dans la nuit (ou par s’endormir sur nos genoux). Nous entamons avec nos infatigables petits voisins une partie du jeu de l’éléphant qui se balançait, qui bénéficie définitivement d’un succès incontestable. Puis la poignée d’enfants entonne la chanson de l’alphabet et celle du clown au gros nez rouge apprises par nos soins, et la soirée se termine sur cette note de complicité partagée.

Les enfants, pas plus que les femmes ou que nos hôtes, ne souhaitent nous voir partir et nous le font clairement comprendre. Ils comptent les jours, et c’est parfois avec tristesse que nous songeons qu’il faudra bientôt quitter cette ambiance et ces personnes extraordinaires. Les femmes, malgré leur condition parfois rabaissante, font montre d’un courage exemplaire, et nous témoignent depuis le début du séjour une tendresse et une chaleur quasi maternelles. Nos hôtes, malgré l’étroitesse de leurs moyens, veillent continuellement à ce que nous ne manquions de rien et font au mieux pour que notre séjour nous soit agréable. Et que dire des enfants, quémandant à qui mieux mieux des signes de reconnaissance, une main à tenir, un sourire ou un mot gentil, en nous les rendant bien ? Cette fête, pourtant joyeuse, célèbre selon Augustin un « évènement de tristesse ». Ces trente jours, qui nous ont paru bien plus, sont finalement bientôt écoulés. C’est sur ces entrefaites que nous nous endormons, sans moustiquaires, car… « au point où on en est ! »

Le dimanche matin, les œufs de pintade effectuent un come-back très apprécié, et c’est avec bonheur que nous dégustons nos sandwichs à l’omelette aux oignons. La journée s’annonce calme, la seule distraction prévue se résumant à la visite de Justin et de son ami en fin d’après-midi : notre orthophoniste souhaite en effet nous rencontrer en dehors du CEFISE pour pouvoir échanger plus librement !

Jusqu’à leur venue, le languissant dimanche se place sous le signe du farniente (et de l’étouffante chaleur) : lecture, écriture, sieste, jeux de carte, discussions diverses…Nous découvrons également le tô, plat national et incontournable, composé d’une sorte de polenta conçue à base de farine de maïs ou de mil et d’une sauce aux multiples ingrédients comprenant l’oseille. Un met surprenant de prime abord, mais ma foi, qui se laisse manger ! Et, avouons-le, le fait de changer de nourriture nous ferait presque paraître un plat de chenilles appréciable (presque). Au « goûter », nous avons droit à un sandwich aux œufs durs et aux oignons grillés. Ces horaires de repas dominicaux ne suivant aucune logique propre, il nous arrive à plusieurs reprises de devoir décliner diverses nourritures, au risque de commettre un impair ! (rappel : refuser une invitation au Burkina, surtout en ce qui concerne le repas, est très mal vu). Mais nos hôtes ne nous en tiennent cure, sachant passer outre leur culture pour comprendre nos embarras occidentaux.

La venue de Justin parmi nous, malgré son retard, nous fait chaud au cœur. Celui-ci nous présente un ami, et nous voici tous rassemblés autour d’une caisse de bière, fanta, coca etc. Nous passons donc un sympathique moment devant le Centre (pour la fraicheur), à raconter blagues et anecdotes, jusqu’à l’arrivée d’une pluie dont l’Afrique a le secret ! Nous nous réfugions donc dans le Hangar, et la soirée continue joyeusement. Un autre rendez-vous est même fixé pour mercredi, en ville, juste avant le décollage, dans un maquis en face de l’aéroport. Nous sommes ravies !

Le lundi matin, de nouvelles boîtes de margarine et de lait concentré trônent sur le banc de petit-déjeuner, avec un tout nouveau pack de thé aromatisé aux fruits rouges, du Nescafé et, bien sûr, trois ou quatre baguettes de pain. Une excellente manière de débuter la journée ! Celle-ci se déroule sans évènement notoire, entre une matinée à jouer aux cartes avec les enfants, un en-cas de brochettes de soja et une après-midi tranquille. En fin de journée, Augustin propose de faire venir une femme qui nous confectionnera de la « bouillie ». Kézaco ? En demandant des éclaircissements, nous apprenons que cette mixture se compose de riz, lait et sucre. Du riz au lait, en fait ? Nous sommes plus que partantes, car nous adorons cela. Nous nous doutons bien cependant que le goût y est différent qu’en France, et nous avons raison : le riz est en fait simplement cuit dans du lait, et c’est à chacun de rajouter du lait concentré sucré et du sucre (oui, les deux) à sa convenance dans sa propre assiette. Attention tout de même à ne pas abuser de ce plat très riche et très nourrissant, sous crainte de le sentir peser sur son estomac ! Nous nous couchons tôt : le réveil est programmé à 7h le lendemain, pour un départ en taxi à 8h en direction d’un site de sculpture sur granit et d’un restaurant proposant entre autres des salades de chèvre chaud. Attention : régal en vue !

Le mardi matin, pourtant, la sortie se voit compromise pour cause de problèmes de santé d’un membre de l’équipe. La journée ne diffère donc que peu des précédentes, si ce n’est par une virée à Marina Marcket, LE supermarché de la ville. Faute de la denrée recherchée, nous revenons en possession de barres de céréales aux cacahuètes et au chocolat, et d’une boîte de Vache qui Rit, dont les burkinabè sont très friands. Les barres nous procurent une joie indescriptible : la nourriture française commence à manquer à nos estomacs overdosés de riz, aliment qui sera d’ailleurs le principal ingrédient du déjeuner. Dans l’après-midi, une pluie presque fantastique de par sa durée et son intensité fait rage, transformant en véritable piscine toute parcelle du Centre qui n’est pas abritée. Nous nous réfugions donc en compagnie d’Augustin sous le Hangar, pelotonnées sous une couverture, et chacun sombre dans ses pensées en admirant le ballet de la pluie divertissant ses spectateurs au rythme du tonnerre. Est-ce là une façon pour l’Afrique de pleurer notre départ imminent ?

3 août 2013

Pas de nouvelles, bonnes nouvelles ! (alias :"pas de CEFISE, pas de nouvelles")

Mardi midi, après nous être remis tout le lundi de notre escapade à Nazinga (ici, le repos nécessite bien une journée !), nous prenons la route pour Fada’N’Gourma (et notamment pour Gomoré, qui est un peu le Zongo de Fada), située à quatre heure de Ouaga. Nous sommes donc cinq à prendre part à l’aventure : Salif, Antoine O, Augustin, et les deux nassara. Dès les premières minutes de trajet, Antoine O préfère nous prévenir : « au centre, là-bas, il n’y a pas de toilettes : il faut faire comme les paysans (=dans les champs). ». La douche, elle, revêt l’aspect d’une mini maison en plein air et sans toit, s’arrêtant hélas au niveau du décolleté. Heureusement, exhiber celui-ci n’est pas inconvenant ici !

Avant de partir, nous prenons soin de déguster un pique-nique composé d’une banane et d’une sorte de pâte verte de haricot. En chemin, les deux gourmandes du groupe cèdent à une des vendeuses à la sauvette postées près des péages (et assaillant littéralement chaque véhicule ralentissant à la vue des barrières) et font l’acquisition de petits biscuits au sésame qui les accompagnent durant les heures du voyage, servant même d’alibi à l’acquisition de la lecture labiale (« sisamo ? » « Hum…t’y es presque ! »). Mais, les estomacs réclamant quelque chose de plus consistant, la voiture sera arrêtée dans un marché le temps qu’Augustin rapporte à tous les passagers un sandwich au mouton (sauf un, au lait concentré sucré, pour la végétarienne du groupe). Comme beaucoup de denrées ici, la viande est moins chère qu’en France. Il est d’ailleurs étonnant de constater qu’au bar, dans un maquis ou encore dans un restaurant, l’eau est plus onéreuse qu’un coca ou un fanta. De même, si un jus de fruit (de mangue, par exemple) est commandé, c’est avec surprise que l’on se voit servir la brique entière d’un litre. Voilà pour la petite histoire.

L’arrivée dans Fada’N’Gourma, puis dans sa banlieue (Tambougou, puis Gomoré) où nous résidons, nous frappe par sa différence : cette ville ne ressemble en rien à Ouaga, la capitale. Fada est en effet une ville beaucoup plus propre, plus verte, sans pollution. Nous nous trouvons en fait dans une sorte de campagne, qui ne peut à notre avis être apparentée à la brousse. Notre habitation fait face aux champs, est entourée d’herbes et de cases traditionnelles, et surtout : elle se trouve au calme. Antoine nous explique qu’ici, les enfants ne peuvent être comparés à ceux de Zongo, car ils n’ont pas vraiment l’habitude de voir des Blancs. Ils sont donc plus méfiants envers eux, et moins visibles (de fait, nous en verrons rarement l’après-midi, le soir ou le lendemain matin). Notre logement nous rappelle fortement le CBZ : deux petites pièces, un salon (où dormiront les garçons) et une chambre (qui nous sera réservée). Après y avoir déchargé nos bagages, nous repartons en voiture pour Fada, afin d’y acheter des nattes pour dormir et un sac de riz de 50 kilos (sans commentaires). Nous aurons également la surprise de rendre visite à une partie de la famille d’Antoine O, dont son père, dans un moment de retrouvailles bien différentes de celles auxquelles nous aurions pu nous attendre en France : nous sommes une nouvelle fois témoins du respect témoigné aux anciens par les plus jeunes.

De retour au camp, après installation des nattes (« en fait, on dort par terre, quoi ! ») et des serpentins anti-moustiques, nous nous rassemblons tous ensemble autour du plat de riz gras cuisiné par nos voisines, un groupes de bonnes sœurs, qui se chargeront apparemment de nous nourrir toute la semaine (contre rémunération bien sûr) : il est en effet prévu que nous travaillions au chantier tous les matins, nous n’aurons donc pas l’occasion de préparer nos repas. Au moment de dormir, nous nous rendons compte qu’une natte d’une place offre un espace assez réduit pour deux personnes, nous décidons donc d’y dormir « dans le mauvais sens », nos jambes dépassant donc largement du tapis. Cette première nuit à même le sol sera une expérience…très parlante !

Le lendemain matin, après un solide petit-déjeuner, les ouvriers commencent à arriver. En les saluant, nous apprenons que « bonjour » en gourmanché signifie « queue de l’âne », il va donc falloir nous méfier et montrer de la bonne volonté quant à la rétention de certains mots de politesse indispensables (ici, il n’y a « que » trois manière de saluer selon le moment de la journée).  Malgré l’imminence des travaux physiques, Marion choisit de se doucher très tôt le matin, pour profiter du plein air, de l’agréable chaleur matinale du soleil (non encore étouffante) et surtout pour se réveiller un peu et désengourdir son dos. Une bonne occasion d’apprécier une fois encore le calme, la verdure, la fraicheur de cette nouvelle ville. C’est à cette ouagaphonienne que reviendra plus tard l’honneur de poser la première pierre de l’édifice, tâche dont elle s’acquitte avec grande fierté. Le chantier va bon train, dans une ambiance détendue mais toujours concentrée, où une même personne peut accomplir diverses actions : transporter des briques, les poser, acheminer des pelletés de « ciment », se servir de la truelle, etc. Finalement, la totalité des briques sera utilisées en un temps record : une matinée ! Elles avaient en effet été préparées à l’avance, en prévision de notre semaine ici. La construction arrive donc à nos genoux, prenant la forme de cinq rangées de briques (les photos viendront plus tard). Une affaire ma foi rondement menée, récompensée par un immense…plat de riz (sauce arachide). L’après-midi,  les deux françaises que nous sommes profitent donc d’un repos bien mérité, et nous rencontrerons plus tard, lors d’une de nos petites promenades en bordure de la forêt (rappelons ici l’inexistence de lieux d’aisance), un groupe d’enfants désirant manifestement entamer une conversation avec nous. Par chance, ces derniers parlent français, nous pouvons ainsi discuter calmement avec eux et répondre à toutes leurs questions. Après un «vous êtes belles car vous êtes blanches » qui nous surprend, nous choisissons de rentrer pour nous couvrir et nous flytoxer généreusement. Après notre sempiternelle écuelle de riz (nous insistons : il faudra bannir cet aliment de nos assiettes à notre retour), nous nous couchons en compagnie des moustiques sur le sol douillet.

Le lendemain matin, après état des lieux des courbatures (la nuit par terre n’arrangeant rien), nous nous préparons à rencontrer le roi de Gomoré, village mitoyen de Fada et Tambougou. Un moment solennel, ou tout notre groupe (et en particulier les deux nassara) reçoit les bénédictions de l’aïeul. Il ne faut bien sûr pas se présenter à sa case les mains vides, nous avions donc fait l’acquisition d’un sac de riz destiné au village, et prévu une somme symbolique destinée à l’achat de la cola, une sorte de fruit à croquer qu’il est de coutume d’offrir au chef. Après de longues tirades en gourmanché (traduites en français par Antoine), nous prenons une photo « de famille » et repartons bénies des meilleurs souhaits du respectable vieil homme. Nous apprenons sur la route nous menant dans notre nouvelle maison que celle-ci ne le restera pas plus longtemps : nous repartons pour Zongo l’après-midi même. Le chantier étant effectivement terminé (pour le moment), notre présence ici n’a plus lieu d’être, et nos guides souhaitent nous faire profiter du pays et de ses merveilles durant notre dernière semaine africaine. Nous préparons donc nos bagages, et profitons allégrement (?) d’un dernier plat de riz. Du moins à Fada !Le repas s’enrichit également de poulet grillé. Notons que dans cette ville, les poulets sont beaucoup moins chers que dans la capitale. C’est pourquoi nos guides décident de se lancer à Zongo dans l’élevage de ces volatiles et s’en procurent donc une cargaison, qui sera attachée du mieux que possible sur le toit de notre véhicule. Cela donnera lieu par la suite à divers moments désopilants : imaginez-vous, discutant tranquillement dans votre voiture, quand soudain surgit à votre fenêtre une pauvre poule tête en bas, l’œil hagard, attachée par une ficelle à sa patte et caquetant désespérément ! Avant de nous mettre définitivement en chemin, nous repassons en ville pour saluer la famille d’Antoine et également pour constituer une provision de miel du Gourma, apparemment célèbre au Burkina. Les cinq heures de route de retour (nous avons un peu trainé en chemin) sont donc ponctuées par de larges fous-rires, non uniquement dus au spectacle cocasse des gallinacés prisonniers : Antoine et son mouchoir Dora l’exploratrice, les « jeux de main » d’Hélène et Antoine provoquant le rire aux éclats de ce dernier, obligé de stopper toute autre activité, les chansons d’Hélène et Marion qu’Antoine tentera de suivre à sa façon, les collections d’œufs de pintade d’Augustin, profitant des petits vendeurs sur le bord de la route (les œufs aussi sont beaucoup moins chers aux environs de Fada), les facéties d’Hélène, surnommée depuis longtemps « gros bébé » par Antoine, les défaites successives de Marion aux jeux proposés par sa camarade… Quelques arrêts indispensables voient le jour, afin de se prendre en photo à côté d’un baobab géant (pléonasme ?), de faire l’acquisition d’un très réputé pain au sésame qui avait plus qu’enthousiasmé Hélène et Marion lors de sa découverte grâce à la directrice du CEFISE, de se réapprovisionner en eau fraiche (et en sachet), d’ « arroser son jardin » (comprendre : se soulager), etc. Nous finissons par arriver à Zongo à la nuit tombée, et, en ouvrant la porte de leur « maison », Hélène et Marion auront la surprise de trouver une moto dans leur « salon ». Antoine fournit très vite la solution de l’énigme : « ah, oui, c’est moi qui l’ai posée là ! », sous les rires attendris et gentiment moqueurs des deux filles. Après un repas composé de délicieux pain au sésame accompagnant un petit bilan sur notre court séjour à Fada, chacun rejoint ses pénates. Ou plutôt, son matelas ! Un bonheur que les campeurs (et encore) comprendront bien.

Vendredi matin, les œufs de pintade sont mis à l’honneur au petit-déjeuner, se transformant pour l’occasion en une divine omelette aux oignons, au jumbo et à l’huile (évidemment), le tout disposé dans un morceau de pain. Une manière fort appréciable de commencer la journée, même si celle-ci ne s’annonce pas particulièrement chargée. Au programme : trouver une prise afin de redonner du tonus à divers appareils électriques, se rendre au cyber-café et, dans la foulée, retourner au Centre d’Artisanat pour quelques emplettes de dernière minute. Finalement, la journée est encore moins active que prévu : après le repas de midi comprenant deux œufs durs et du pain, une pluie diluvienne s’abat sur le toit métallique, compromettant par sa longue durée toute velléité de sortie.

Le samedi matin, c’est l’effervescence : la fête de notre départ se prépare, femmes et enfants envahissent le Centre. Nous décollons certes mercredi, mais pour cause de travaux aux champs des femmes et des enfants, il est apparu plus judicieux d’utiliser le week-end pour réunir toutes les personnes désirant nous dire au revoir.  Après un petit-déjeuner à base de beignets, nous laissons derrière nous l’agitation et les préparatifs pour rattraper les activités avortées de la veille : direction le marché artisanal et le cyber-café ! Que nous réservent l’après-midi et les jours à venir ? Il est impossible pour nous de le savoir, sauf, peut-être, en ce qui concerne le mardi ; il est clair en effet que nos amis ont pour objectif de nous faire découvrir quelques lieux touristiques non loin de Ouaga, pour ne pas que nous ne gardions de notre séjour une impression de travail incessant. Ainsi, nous devrions nous servir de la journée mentionnée ci-dessus pour assouvir nos besoins touristiques, dont nous avons établi le programme avec nos hôtes. Arriverons-nous à bout de cette liste de souhaits ? De quoi seront constitués les jours à venir ? Quels seront nos sentiments lors de l’attente à l’aéroport mercredi soir ? Nos émotions sont tellement diverses ici, expérience douce-amère qu’il nous faudra, nous le savons, décrypter avec sagesse et recul, et qui nous fera réfléchir sur du long terme. Qu’aurons-nous à raconter en premier à notre retour, que répondre aux personnes qui demanderont immanquablement (et de façon logique, évidemment) comment se sera passé ce séjour et ce que nous en retenons ? La différence de mentalité régnant ici ne nous aide pas à faire la part des choses, mais c’est cela qui rendra, au final, ce séjour encore plus enrichissant : nous rencontrons diverses personnes ici, non issues des mêmes familles, quartiers, villes ou même régions. Beaucoup de manières de penser nous sont présentées, et nous pouvons retirer des enseignements de chacune d’entre elles. La culture même, dans chacun de ses aspects (positifs ou négatifs) nous offre une dissemblance édifiante d’avec la nôtre, ce que vous avez pu observer tout au long de ce blog. Alors, si nous ne trouvons pas tout de suite les mots, ne vous en offusquez pas, et laissez-nous vous apprendre la patience qu’ont su nous transmettre nos amis burkinabè !

 

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30 juillet 2013

Ouaga, ô Ouaga, à très vite !

Chers lecteurs,


Marion et Hélène étant parties au fond de la brousse, je m'immisce discrètement sur le blog pour vous faire part de mon retour en France anticipé. Samedi 21, l'article posté vous faisait part d'une certaine morosité, et quelques photos montrent des messages adressés à mon petit frère Yoann. J'ai en effet appris le vendredi précédent qu'il était atteint d'une leucémie aigue. Après le choc que l'annonce a représenté, j'ai décidé de rester une semaine à Zongo afin d'y terminer les stages que nous avions prévus. Cependant, rester une semaine et demi supplémentaire, qui plus est dans la brousse, m'a semblé beaucoup trop difficile moralement. Ne voulant pas que mon état psychologique ne pèse sur les filles, ni sur les trois A, j'ai pris la difficile décision de rentrer parmi les miens plus tôt que prévu. J'ai d'ailleurs pu voir Yoann hier dès ma sortie de l'aéroport, et je dois dire que, du haut de ses onze ans, il fait preuve d'un courage extraordinaire.

Pas d'inquiétude pour les filles : nous avons beaucoup parlé de mon départ et, malgré notre tristesse, le projet continue comme prévu pour elles. Elles sont parties hier pour Fada N'Gourma et comptent apporter là-bas toute la joie dont elles sont capables. L'expérience promet d'être dépaysante et très grisante. Au retour, je ne doute pas une seule seconde que Marion vous narrera leurs aventures comme personne, et qu'Hélène vous éblouira avec de magnifiques photos.

Indirectement, et même si elle ne peuvent pas lire ce blog de là où elle sont, je tiens à les remercier de leur compréhension, de leur soutien et de leur force, qui m'ont permis de prendre ma décision sans culpabilité. Je remercie également toutes les personnes (mes proches, et vous également, proches de Marion et d'Hélène) qui m'ont témoigné leur soutien et qui encouragent la guérison de Yoann.

Les trois A ne disent plus "ton frère" mais "notre frère, parce que si c'est le tien, c'est aussi le nôtre". Ils m'ont promis de prier pour lui aussi fort que possible, et ne doutent pas qu'il s'en sortira très bien et très vite. Les quitter a été très dur, mais je compte sur leur venue en France, et sur un autre voyage au Burkina dès que l'occasion se présentera.

Merci à tous de suivre ce blog, tous les messages nous vont droit au cœur. Hélène note toutes les phrases amusantes pour vous les retransmette aussi fidèlement que si vous étiez là, et Marion fait tout son possible pour transcrire nos aventures. Je lui souhaite de pouvoir publier quelque chose très vite !

En vous souhaitant une très bonne semaine (ayez une pensée musculaire pour les filles, qui doivent dormir sur une natte à même le sol a priori, et une autre pensée, cette fois gastronomique, puisqu'elles risquent certainement de manger du riz là-bas... eh oui, encore !)


A bientôt,

 

Gwen

 

 

28 juillet 2013

Dans la jungle, terrible jungle...

Vendredi matin, dernière matinée au CEFISE. Après un point avec Justin sur ces quinze jours passés à travailler ensemble, et un modeste don de matériel orthophonique acheté en France, Hélène et Marion décident d’aller saluer une dernière fois la directrice. Celle-ci, touchée par notre départ, décide de nous offrir à toute les trois « un souvenir du CEFISE » : une écharpe tissée par la section des brodeuses du Centre, ce dernier s’occupant de l’insertion professionnelle des jeunes en difficulté. Un présent qui nous touche beaucoup, et c’est ainsi qu’une page se tourne : le voyage continue, mais pas ici. De retour à Zongo, Gwen apprend à ses deux amies que les cours n’ont pas eu lieu ce matin-là, pour cause de préparatif de la fameuse fête de « fin d’école ». Effectivement, c’est l’effervescence dans la propriété ! Des enfants par dizaines, des femmes cuisinant des montagnes de riz, un déménagement de bancs et tables : une agitation à laquelle nous ne prenons pas part immédiatement, préférant nous reposer un peu dans la « chambre ». Jusqu’à ce que l’on nous appelle pour le repas : en tant que nassara, nous avons le droit de manger avant tout le monde, dans des assiettes et avec des couverts, afin de « prendre des forces pour l’assemblée et [notre] discours ». En effet, pas de sieste post-prandiale : nous sommes appelées dès la fin de notre remplissage d’estomac à nous asseoir à la table présidant l’assemblée de bancs. S’ensuit un long discours d’Antoine O, traduit en mooré par Augustin, résumant notre partenariat, nos objectifs, et le courage des nassara d’avoir quitté leurs parents, familles pour venir vivre les réalités de Zongo et « aller chercher l’eau à la fontaine ». Tour à tour, les représentants des femmes, des professeurs, de l’ASPRO-DPHI prennent la parole pour témoigner de la joie que nous leur avons apportée, et nous remercier d’une façon que les mots seuls ne sauraient retranscrire. Ainsi, l’image de cette femme nous annonçant : « Avant, j’étais dans l’obscurité, maintenant je sais écrire mon nom et celui de ma voisine » persiste : nous qui avions peur de ne pas être à la hauteur, de ne pas répondre aux attentes, nous voilà pour le moins rassurées ! Cette assemblée, ces remerciements sincères et puissants, ces applaudissements, l’impression d’avoir accompli quelque chose d’extraordinaire, tout se mélange et nous émeut : ces gens nous ont tellement appris, eux aussi : ce séjour est un partage, une transmission mutuelle. Puis vient le moment de nos discours à nous, les « professeurs des professeurs », ponctués de rires (oui, nous avons de l’humour) et d’applaudissements touchés. Après cela, nous sommes chargées de distribuer des récompenses à tous les participants : des poignées de stylos passent ainsi de nos mains à celles d’enfants avides, de sereines femmes et de professeurs un peu dubitatifs. Cette répartition donnera lieu à un trafic de bic, crayons et marqueurs en tout genre, à des « moi j’en n’ai pas eu », « je préfère le stylo vert » et autres doléances.

Arrive ainsi l’heure du repas pour les participants. Un groupe de jeunes garçons nous invite donc cérémonieusement à nous joindre à lui, ce que nous nous devons d’accepter pour ne pas risquer une offense ! Ayant déjà mangé, le geste reste symbolique, de même que la poignée de riz engloutie à même les doigts et piochée dans le plat communautaire.Beaucoup de photos seront prises par la suite : les trois ouagaphoniennes avec toutes les femmes, les enfants se bousculant pour apparaître dans le cadre, les 3A émus…Que de souvenirs sur papier glacé !
L’après-midi est déjà bien avancée quand la musique retentit : il est l’heure de danser ! Enfin, d’offrir un spectacle assez piteux aux enfants ne sachant pas sur quel pied danser, à l’instar des trois nassara. Les femmes viennent nous « admirer » un moment (ou pouffer de rire en nous regardant gesticuler tout en nous singeant), puis vient le moment émotion : Gwen, armée de son imprimante, leur offre les plus beaux clichés les représentant. Elles nous avouent ainsi leur tristesse à l’idée de nous voir partir, nous proposant de rester ou de les amener en France. Y aura-t-il assez de place dans nos valises ?
Finalement, les enfants partent assez tôt : auraient-ils senti que les nassara étaient fatiguées de servir d’attraction ? Ces dernières se mettent au lit très vite, car le réveil est programmé le lendemain matin à 5h45 : il a été convenu que nous pourrions profiter du village artisanal (et de ses merveilles) avant de prendre la route pour Nazinga, à condition de partir à 7h de Zongo. Faire du shopping, ça se mérite !

Samedi matin, première phrase de la journée : « p*tain, ça arrache la gueule. » (Réponse :   « effectivement, c’est rude. ») : Même en période de cours (ou de stages), nous ne nous levons pas si tôt ! Après la douche et le petit-déjeuner, nous voici fin prêtes pour le départ ! Salif et son Land Rover sont ponctuels, mais on ne peut pas en dire autant des deux Antoine, qui sont introuvables (et injoignables). Et, pour en rajouter, c’est avec une grande surprise que nous voyons arriver…le tailleur ! Ce dernier nous annonce en effet qu’il est chargé de prendre nos mesures, afin de confectionner les fameux costumes traditionnels que l’on nous a promis. Le moment n’est pas forcément judicieux, mais nous nous prêtons bon gré mal gré à l’exercice (en précisant toutefois au jeune homme qu’il faudra «extrapoler » le tissu à certains endroits, car une probable prise de poids nous menace dès notre retour en France). Nous finissons tout de même par coloniser le véhicule de Salif, Augustin nous ayant prévenues que nous ne serions finalement que cinq à partir en week-end. Nous sommes un peu déçues, mais cela n’entame pas notre bonne humeur ! Nous choisissons de monter toutes les trois à l’arrière du 4x4, qui est un véhicule de tourisme : point de sièges ni de portes arrières, mais plutôt une sorte de coffre géant muni deux bancs de chaque côté. Augustin, lui, monte à l’avant avec Salif. Et nous voilà donc partis ! En bourlinguant sur la route non entretenue de Zongo, et en manquant de s’assommer au plafond à chaque coup de frein. « C’est l’aventure ! »
Comme prévu, nous faisons deux arrêts avant de prendre « définitivement » la route : un marché artisanal peu touristique, presque caché et non tape-à-l’œil, et le fameux village artisanal, immense succession de boutiques de souvenirs, presque impersonnelles dans leur présentation : cet endroit semble être incontournable pour l’étranger voulant visiter Ouagadougou, et cela se ressent dans la différence avec le premier lieu de vente. Dans tous les cas, les négociations vont bon train : les objets peuvent parfois ne valoir que la moitié du prix énoncé dans un premier temps par le marchand, voire le tiers ! D’autant que nos allures de nassara font de nous des proies faciles, ou des porte-monnaie sur pattes : il faut donc se méfier. Mais nous repartons enchantées de nos achats, et nous consolons d’avoir été les potentielles victimes d’escroqueries en nous persuadant que nous avons fait marcher l’économie locale.

Dès la sortie de Ouaga, le paysage change, et nous rappelle quelque peu celui observé lors de la visite aux caïmans sacrés : la verdure prend possession du paysage, se fait maîtresse de l’horizon et nous laissons derrière nous maisons délabrées et rues couvertes d’ordures. Nous nous pâmons devant des « champs de nénuphars », et nous réjouissons du retour des arbres. La palette de couleurs chaudes de l’Afrique nous saute encore une fois aux yeux : un mélange d’ocre orangé, de différentes nuances de vert, de marron…Le brun de la terre se noie dans la flore luxuriante en un apaisant mariage. Les arbres semblent se diviser en mille et mille variétés, allant du plus fin, telle une branche plantée dans la terre, au plus colossal, à l’instar du baobab, l’arbre de la sagesse. Au fil des kilomètres que nous avalons, nous distinguons successivement des buffles (zébus ?), ânes et chèvres paissant l’herbe grasse. La saison des pluies leur offre cette opportunité, et nous apprenons ainsi que l’autre saison de l’Afrique donne un nouveau visage à cette dernière, qui devient un monde totalement différent : deux saisons, deux facettes. Nous voyons également défiler de petits villages, constitués de cases en terre séchée aux toits de chaume : des habitations beaucoup plus traditionnelles que celle nous ayant accueillies jusqu’à maintenant ! Ces hameaux sont entourés de champs que cultivent des femmes aux pioches bien dérisoires quant à l’étendue de la terre à labourer et semer. Plus nous avançons, plus le ciel se fait noir et menaçant : quelques gouttes percerons finalement les nuages pour venir chanter sur le toit de notre véhicule, et c’est sous une averse grandissante que nous poursuivons notre voyage. Jusqu’à la vue de singes assis sur la route et bondissant sur le bas-côté à notre arrivée, déclenchant nos cris émerveillés. Salif s’arrête, les trois nassara que nous sommes restent bouche bée. Les primates, eux, se figent et nous dévisagent impassiblement, presque curieux : suivra un silence d’observation mutuelle, quelques secondes s’étirant inexplicablement, puis la magie se brise et les singes courent se réfugier dans l’épaisse végétation. Nous tenterons ainsi de dénicher du regard d’autres animaux, jusqu’à notre arrivée dans la ville de Pô, marquant la fin de la route goudronnée et le début de 55 kilomètres de piste pour atteindre le ranch. Ce dernier se trouve encore à deux heures d’ici : la route est mauvaise. Il est plus de midi, nous décidons donc de nous arrêter dans un « fast-food » local afin de nous sustenter avant d’arriver à Nazinga. Hélène et Marion sont dépitées par le premier plat énoncé par le serveur : riz sauce. Le choix n’est pas élevé, mais elles se rabattront sur les macaronis en sauce, tandis que Gwen commandera le riz, dont elle dit ne pas se lasser. Une fois le frugal repas englouti, nous fonçons (puis ralentissons aussitôt) à bord de notre tank dans les trous remplis d’eau de pluie, et arrivons à l’entrée du ranch une heure plus tard. Après paiement de diverses taxes et réservation d’une sortie avec un guide spécialisé (prévue dans deux heures), nous voilà reparties, l’œil alerte : à partir d’ici, nous sommes susceptibles de croiser n’importe quel animal ! (mais peut-être pas un pingouin, comme le croit Marion en regardant un tronc d’arbre en bois blanc calciné). Gwen repèrera d’ailleurs un singe peu de temps après, sur lequel s’extasieront ses deux camarades. Et pourtant, ce n’est rien à côté de la monumentale surprise que représentera la découverte (par Hélène) d’un petit troupeau d’éléphants gris foncé, sur le bord de la route, quelques minutes à peine après notre entrée dans la réserve. La rencontre sera brève, les éléphants faisant mine de charger le 4x4. Salif et Augustin nous expliquent que nous avons été très chanceuses : voir des éléphants, surtout sans guide, relève du pur hasard et de la bonne fortune. Notre première entrevue avec eux restera ainsi un souvenir incomparable, mais c’est après coup que nous le comprendrons. Plus tard, Salif nous informe qu’il nous est possible de monter sur le toit du Land Rover afin de mieux profiter du panorama (et de mieux détecter les animaux). Nous acceptons à renfort de grands cris suraigus, et Augustin accepte de bonne grâce de nous accompagner. Ineffable sensation que celle de se sentir libre, de profiter de la caresse du vent dans les cheveux, d’inspirer à fond les odeurs de la nature, d’admirer à l’infini l’océan vert clair et d’en ouïr les palpitations de vie. Evidemment, le véhicule est malmené par la route de gruyère, et cela se ressent dans la moindre de nos articulations. Mais nous ne nous en plaignons pas, au contraire : c’est l’aventure ! Augustin, après être sûr que nous nous sommes habituées à ce mode de locomotion pittoresque, redescendra tenir compagnie à Salif.

Perchées sur la cime de notre observatoire, nous sommes donc toutes à l’affût, et nous nous frappons pour nous prévenir mutuellement de la vision d’un animal, afin de ne pas crier et risquer d’effrayer ce dernier. Nous faisons donc appel à toute notre attention soutenue, notre vigilance, notre capacité à ne pas tomber de la voiture, et surtout à la résistance de nos fesses : après notre cure amincissante, il est assez douloureux de sentir les os de nos fessiers, surtout quand celles-ci rebondissent à chaque cahot. Il faut également bien prendre garde aux branches basses, et il n’est pas rare d’entendre l’une d’entre nous crier « BRANCHE », voire « ARBRE » dans les cas extrême. Il est dans ces cas-là assez cocasse de voir tout le monde s’aplatir, se tomber dessus ou s’agripper les unes aux autres. Cette traversée du parc donnera naissance à d’innombrables fous rires, boutons de moustique (ils sont décidément partout), dégustations involontaires de feuilles et photos floues (« ça bouge trop !! »).

Nous finissons par arriver au cœur de la réserve, là où sont situés la réception, les logements, le restaurant..bref, les êtres humains. Après avoir pris possession des deux bungalows (un pour les deux garçons, l’autre pour nous) et des toilettes (de vraies toilettes !) nous repartons un peu plus tôt que prévu à l’aventure avec le guide spécial, qui monte donc avec nous sur le toit du véhicule. Avec lui, nous sommes plus sérieuses : l’ambiance est vraiment à la recherche d’animaux, fi des chants et autres blagues déclamés à haute voix. Nous sommes donc dans un amalgame végétal, une atmosphère des plus apaisantes se fait ressentir : un bruyant silence, que vient seulement troubler le chant des oiseaux et le bruit de notre moteur. Nous sommes loin de tout, presque seules au monde, planant au sommet de notre mât d’observation. Notre guide au balayage visuel surpuissant (« mais comment il a fait pour voir ça… ») fait fréquemment stopper Salif, pour pointer du doigt divers animaux : des antilopes, des oiseaux aux couleurs fluo et chatoyantes (bleu, jaune, orange, vert…), des babouins, des marabouts (oiseaux), des grands calaos (oiseaux), des pintades (dont la grâce n’a d’égale que la rareté, vous en conviendrez). Les animaux, après un court temps d’observation, finissent par détaler devant nous, plus ou moins gracieusement. Les antilopes, en effet, font preuve d’une agilité majestueuse, d’une stature élancée, d’une rare élégance. Les voir courir nous coupe le souffle, tant leur fragile beauté nous touche. Ce spectacle, nous ne nous en lassons pas, bien que les antilopes soient les animaux dont nous dénombrons le plus de spécimens observés.Mais bien sûr, tacitement, ce sont les éléphants que nous cherchons. Nous nous rendons compte qu’effectivement, il n’est pas si simple de croiser leur route, et que la chance nous a bel et bien donné un coup de pouce quelques heures auparavant. Nous finirons cependant par apercevoir un 4x4 arrêté sur le bas-côté, dont le groupe de touristes semble absent. Et pour cause : nous détectons leur présence plus loin dans la forêt, face à deux éléphants se nourrissant de feuilles. Nous descendons donc de notre perchoir, et suivons leurs traces à travers les hautes plantes. Sans trop s’approcher des éléphants : il ne s’agirait pas de se faire charger par ces gros mammifères enragés ! Ces derniers, nous apprend notre guide, peuvent courir jusqu’à 60 kilomètres/heure. Malgré la distance et les arbres nous masquant les pachydermes, c’est avec émotion que nous profitons de l’instant : admirer des éléphants sauvages, au milieu de la forêt africaine, est une occasion qui n’est pas donnée à tout le monde, et que nous ne revivrons peut-être jamais. Entendre leur respiration et les branches craquer sous leur pas, contempler le moindre de leur mouvement tout en retenant notre souffle, à peineoser lever le petit doigt, voilà des sensations qu’encore une fois, des mots ne pourraient traduire fidèlement : certaines expériences ne se racontent pas, elles se vivent, se ressentent. Nous ne resterons pas longtemps, car ces deux gigantesques pachydermes sont en réalité unis par un lien filial : notre présence rend la maman anxieuse, il ne serait pas prudent de s’attarder. Ainsi, pendant que nos pieds foulent les herbes humides de pluie et les branches mortes sur le chemin du retour, c’est avec une foule d’émotions que nous pouvons mentalement nous répéter : « je viens de voir des éléphants sauvages».

Après avoir à nouveau grimpé à la frêle échelle nous menant vers les planches inconfortables du toit, nous repartons, dans l’espoir de déceler à nouveaules herbivores porteurs d’ivoire. Nous ne rencontrerons pourtant plus que des rares antilopes (ou des branches d’arbre assommant Gwen à moitié), mais cela ne nous attriste pas : pouvoir observer les immensités aquatiques recouvertes de nénuphars, les arbres envahis par les lianes ou la sereine marée végétale nous offre un calme bienvenu, l’impression réelle de vivre quelque chose d’extraordinaire, dans la lumière féérique du soleil couchant. Les cris des singes, les pépiements des oiseaux et la musique si particulière de brousse nous bercent, ainsi que les balancements appuyés de notre véhicule. Nous sommes heureuses de vivre cette journée qui nous semble remplie de mille émotions différentes, et surtout, nous sommes heureuses de la vivre ensemble.

De retour au camp, et après avoir remarqué avec surprise des bébés singes à deux pas de notre bungalow, nous prenons à peine le temps de nous reposer et de nous rendre compte que demain, nous aurons certainement des bleus et des courbatures. Nous repartons en effet vers le restaurant à la nuit tombée (donc à 19h) pour y savourer de la semoule aux petits pois (un concept original, et qui se laisse agréablement manger)(tant que ce n’est pas du riz) et ¼ de poulet chacune pour Hélène et Gwen, qui succombent également à l’appel du Fanta. Nous cédons également à l’appel de la gourmandise et nous offrons le luxe d’une crêpe au sucre chacune. Notre premier vrai dessert depuis notre arrivée ! En sortant du restaurant et en levant les yeux, nous nous apercevons que des millions d’astres étincelants parsèment le ciel : les constellations et la voie lactée sont beaucoup plus visibles qu’à Ouagadougou, loin de la pollution et des éclairages artificiels. Observer ces rutilantes paillettes, tout en profitant du chant des grillons et de la brousse montant vers elles dans une irréprochable harmonie, nous fait à nouveau prendre conscience de la beauté du moment que nous sommes en train de vivre. S’y ajoute la satisfaction de retrouver pour un temps une relative intimité personnelle, un meilleur confort matériel et un mode de vie plus rapproché du nôtre. Les ventilateurs, la douche, les toilettes et « l’abondance » de nourriture sont des privilèges dont nous n’avions, avouons-le, plus l’habitude, et dont la redécouverte ajoute une part de surnaturel au caractère fantastique de ce jour particulier. Nous décidons d’un commun accord de nous octroyer une « grasse matinée » jusqu’à 9h le lendemain : nous l’avons tout de même bien mérité !

C’est donc au son des lénifiants bruits de la vie nocturne que, bercées, nous nous endormirons quelques minutes plus tard, épuisées mais enchantées par cette journée inoubliable.

Rubrique des grosses nouilles dans la brousse :

« Ça sent le caca d’éléphant !! On n’est pas loin des éléphants !! »

« Regardez, un crocodile ! Ah, non, c’est une branche d’arbre… »

« On se croirait dans le safari Pokemon, vous trouvez pas ? Genre « un Colossinge sauvage apparaît ! » »

 

26 juillet 2013

Ce n'est qu'un au revoir !

Le jeudi fut une journée assez routinière, dans le sens où vous connaissez maintenant le déroulement type des jours de notre semaine : sonnerie du réveil,  « cris » de Gwen pour réveiller Hélène (Marion sort de la douche quelques instants plus tard), petit-déjeuner composé de pain pour Marion et Gwen et de beignets pour Hélène, départ pour le CEFISE. Pendant que Marion assiste aux séances de rééducation, Hélène continue sur sa lancée créatrice (appelant sa complice à la rescousse pour une séance découpage), et suscite l’enthousiasme de Justin avec ses trois jeux : mission orthophonique accomplie, avec les félicitations du jury ! Hélène peut être fière d’elle.

*Pendant ce temps, à Zongo…*

Le prédateur rôde…caché dans l’ombre, il observe sa proie, pauvre créature innocente loin de se douter du sort funeste qui l’attend. Le prédateur sait la chétive bestiole à sa merci, ses yeux brillent de convoitise, il ressent là le calme avant la tempête, le silence avant l’explosion, le temps suspendu avant le coup de feu annonçant le début de la course. Et cette dernière commence enfin : les deux adversaires font montre dès le début de la poursuite d’une grande rapidité. Les respirations s’accélèrent, les cris de détresse du pourchassé retentissent. De virage en virage, la poussière se soulève, ajoutant à la scène un caractère mystérieux. Le suspense est à son comble, et pourtant des éclats de rire s’élèvent soudain du public hilare : Gwen, piteuse, n’a su rattraper le pauvre petit poussin. Elle sera finalement aidée par une des femmes présentes dans le Hangar qui la prendra en pitié, et tiendra bientôt entre ses mains la petite boule de plume tant désirée. Mais le gallinacé  duveteux ne compte pas se laisser faire si facilement, et c’est après deux évasions que Gwen peut enfin débuter une mission qui lui tient particulièrement à cœur : retrouver la maman poule. Cette décision fera naître les moqueries d’Augustin : « et tu comptes aller jusqu’à l’autre bout du village pour retrouver sa mère ? ». La solution ne se trouvera pourtant pas si loin, et, après moult aventures, c’est chez la voisine que l’amour maternel pourra renaître (enfin, si Gwen ne s’est pas trompée de poulailler).

En milieu d’après-midi, après le sempiternel riz aux légumes sauce tomate, les cours reprennent pour les professeurs tandis que Marion et Hélène se reposent dans la chambre : Marion est en effet suspectée d’avoir abusé des gâteaux qui ont pourtant fait son bonheur (ou serait-ce la chenille qui pèse aussi lourd dans l’estomac ?), et souffre d’une mini-indigestion. Rien de grave, mais une bonne leçon pour la gourmande ! (L’achèvement de la boîte de chocolat n’est du coup pas de son fait)

Hélène relatera par la suite à ses coéquipières une de ses énièmes conversations avec Antoine O (nous ne nous en lasserons jamais !), dont voici le résumé : au Burkina, dès que les garçons atteignent l’âge de 15 ans et/ou que les filles ont leurs règles, les parents construisent une petite case indépendante de la propriété familiale afin que les jeunes puissent se courtiser. En effet, l’on ne doit pas flirter,  se tenir la main ou s’embrasser en public. L’éducation sexuelle des jeunes filles est gérée par la grand-mère, dès l’apparition des premières règles. Notons qu’un homme peut courtiser une femme qui a le cœur pris, et ce pour plusieurs raisons : en premier lieu, une femme est faite pour être courtisée. Par ailleurs, il règne ici un souci d’honnêteté : l’homme ne peut se mentir à lui-même ou se cacher, ce qui le rendrait malheureux, et exprime donc ses sentiments. Enfin, le cœur de la femme, bien qu’il ne soit pas libre aujourd’hui, le sera peut-être demain : si la femme se rend compte un jour que son copain ou mari ne lui convient plus, peut-être se souviendra-t-elle de ses autres soupirants. Ainsi, si un homme exprime des sentiments pour une femme, celle-ci se doit de les honorer : soit en y répondant par la positive, soit en lui trouvant une copine aussi bien qu’elle. Comme le dit notre ami : « ton cœur est pris, mais il y reste de la place pour quelqu’un d’autre ». Si vous avez des avis sur la question, n’hésitez pas !

La fête prévue le soir même est finalement décalée au lendemain, pour pouvoir nous laisser le temps d’apprendre des danses avec les enfants. Le Hangar s’illumine d’un éclat blanchâtre (voir un néon ici paraît presque incongru), et les essais musicaux reprennent, avec plus de méticulosité que jamais. Les enfants s’éparpillent partout dans le Hangar et s’en donnent à cœur joie, sous nos regards attendris (et un peu niais). Nous nous rendons ainsi compte d’une différence fondamentale entre les français et les africains : ces derniers ont la danse dans le sang. A côté des enfants, même des plus jeunes, les nassara font pâle figure (c’est le cas de le dire) ! Leurs mouvements, souples et gracieux, soulignent notre raideur et notre retenue : chez eux, pas de complexes, le langage du corps est maîtrisé, leurs corps ondulent librement au rythme de la musique pendant que nous semblons nous trémousser avec peine. Développement psychomoteur africain : 1. Développement psychomoteur français : 0. Entre rire et apprentissage des chorégraphies, petites chamailleries et jeunes marmots piquant du nez sur les genoux des ouagaphoniennes éreintées, camaraderie et chaleur humaine, c’est en somme une magnifique soirée que nous passons sous le signe du partage, de la bonne humeur et de la joie d’être ensemble.

Ce matin, nous vous écrivons donc du CEFISE, et demain matin, si tout va bien, nous partirons à la rencontre des éléphants de Nazinga pour le week-end : nous serons effectivement logés dans un bungalow du ranch (muni de douche et toilettes !) pour la nuit de samedi à dimanche. Le retour s’effectuera  dans la soirée dominicale, et prendrons la route pour Tambougou dès le lendemain. Comme nous l’avions fait remarquer, ce village est situé dans la brousse : si l’espoir d’une connexion internet semble utopiste, nous ne savons pas ce qu’il en sera du réseau téléphonique : les antennes d’Airtel se projettent-elles si loin ? Dans le doute, ne vous inquiétez pas d’un éventuel silence radio durant le week-end et la semaine à venir, voire jusqu’à notre retour en France. Si toutefois dans un mois nous ne donnons pas signe de vie, il vous est permis de commencer à paniquer.

Nous ne savons pas grand-chose de ce qui nous attend dans la brousse, si ce n’est que la langue parlée en ces lieux n’est pas le mooré mais le gourmanché : tout un apprentissage à refaire ! Des cours de français sont évoquées pour les femmes de Tambougou qui y sont très demandeuses. Notre participation à un chantier de construction est également évoquée. Dans tous les cas, nous n’aurons pas le temps de nous ennuyer ! (Sauf peut-être sur la piste cahoteuse et poussiéreuse que nous suivrons sur à peu près 250 kilomètres avant d’arriver à destination).

Si la présence des trois A semble assurée pour le week-end à Nazinga (ainsi que celle de Salif, un autre chauffeur auquel nous faisons appel pour l’occasion ; nous serons donc sept), la semaine suivante sera témoin de la réduction des effectifs, ce que nous regrettons mais comprenons. Nous retenterons la découverte du village artisanal les jours suivant notre retour à Zongo (prévu le dimanche 4 août), avant de nous envoler vers la France dans la nuit du mercredi à jeudi (arrivée estimée à 14h15, pour les curieux).

Mais pour l’heure, tout cela semble bien loin : le mode de vie d’ici consistant à vivre au jour le jour, nous profitons de chaque instant en évitant (ou en ayant l’impossibilité) de nous projeter : Hakuna Matata ! (il fallait forcément la faire, celle-ci, non ?)

Et comme on dit ici : au plaisir de nous retrouver...! 

25 juillet 2013

Que d'insectes, que d'insectes

Dans la nuit de mardi à mercredi, une pluie torrentielle s’abat sur la ville durant cinq heures d’affilée, transformant Zongo en une marre de boue géante. Marion et Hélène peuvent tout de même se rendre au CEFISE afin d’y fabriquer du matériel orthophonique (et d’y caresser les rares chats que nous pouvons admirer dans la ville), tandis que Gwen poursuit sa lancée professorale.  Les matinées respectives se déroulent donc sans heurts, et nous nous retrouvons toutes les trois avec plaisir. Jusqu’à ce que nous prenions connaissance du menu du midi : chenilles grillées ! Avec du riz (évidemment), et les légumes et condiments habituels (vous avait-on parlé des cubes Maggi, une institution par ici ?). Hélène détient ainsi le record avec la « dégustation » de deux chenilles, tandis que Gwen et Marion se targuent tout de même d’en avoir ingurgité une chacune. Plus tard dans la journée, Augustin provoquera le dégoût des trois nassara en savourant un sandwich uniquement composé de ces insectes : une vision…inoubliable !

L’après-midi, pendant que Gwen se repose, Hélène et Marion se chargent des enseignants dans un studieux silence (non, les enfants n’étaient pas dans le Hangar). Un petit point financier (eh oui, il en faut), et nous assistons au grand retour de la technologie dans l’antre du Savoir : chaîne stéréo, branchements en tout genre, basses vibrantes : les festivités de jeudi soir se préparent avec application ! Nous avons d’ailleurs pour mission d’apprendre une chorégraphie aux enfants pour la danser avec eux lors de cette fameuse soirée : leurs évaluations ayant lieu le jeudi après-midi, ce cadeau sera bien mérité ! Antoine nous confie également que nous devons choisir parmi une collection de tissus ceux que nous préférons respectivement, afin que les femmes nous cousent des habits traditionnels (après prise des mesures, s’il vous plaît !). Ce choix cornélien sera récompensé par le retour très attendu des fameux gâteaux dont nous vous rebattons les oreilles, et dont nous vous offrons une photo en exclusivité.

Le reste de la soirée se passe donc en musique, un choc des cultures dont nous avons pris l’habitude et qui nous ravit (mais peut-être moins nos cellules ciliées !) (Blague orthophonique). Un petit jeu du loup à l’extérieur avec les enfants pour aller au frais tout en transpirant (tout un concept), suivi de jeux assis dans la poussière avec eux (« un éléphant qui se balançait sur une toile toile toile, toile d’araignée » fait fureur !) et nous voici fin prêtes pour un bon décrassage ! Une mention spéciale pour un des enseignants, véritable guerrier osant prendre sa douche de nuit, en compagnie des cafards. Un fait d’autant plus admiré que Marion, voulant se rendre aux toilettes deux soirs plus tôt dans un acte d’un rare héroïsme, a eu le plaisir de sentir une de ces charmantes bestioles tomber dans ses cheveux et s’y promener allègrement. Moralité : avant d’aller vous soulager, inspectez bien le plafond !

 

Chroniques des remarques naïves de la jeunesse africaine :

[La petite Fadila, 5 ou 6 ans, dans les bras de Marion, parle à son petit frère qui est porté par Hélène] : « Chacun sa nassara ! »

 

Chroniques de la candeur africaine :

(Contexte : dans le taxi nous menant au CEFISE)

« - J’ai reçu plein de boue sur le bras !

(chauffeur ) – Ah, oui, tu en as partout ici !

- Hum, non, ça c’est mes grains de beauté… »

 

Rubrique des grosses nouilles :

Catégorie : « j’ai peur des insectes »  (conversation de la chambre au salon) :

« - Mais j’ai hyper mal c’est pas possible, y’a un truc qui me pique mais je sais pas quoi, ça me tue !! (…) Aaaaaaaah, c’est ça, c’est une fourmi, elle est juste là !! (*donne de grosses claques sur sa jambe, puis sur le matelas*)

- Tu l’as tuée ?

*BAM BAM BAM BAM* (gros coups de livre volumineux) : - Oui. »

 

24 juillet 2013

A l'intention des adhérents de Zoodo

Nous avons pu remarquer ces derniers jours des commentaires à l'attention d'Antoine. Or, ce blog est tenu par nous trois (Gwen, Marion et Hélène) dans l'unique but (originellement) de relater notre vie ici. Nous avons fait une "entorse" à ce but afin de rendre service à la fois aux trois A et à vous, membres de ZOODO car le transfert des photos par mail est bien trop fastidieux.

Nous comprenons cependant vos attentes, et les transmettrons aux garçons. Ils se feront, nous en sommes certaines, un grand plaisir d'y répondre.

Merci à vous pour vos commentaires de soutien et d'encouragement qui nous vont droit au coeur. 

Les trois ouagaphoniennes.

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Les orthos au Burkina !
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