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Les orthos au Burkina !
14 juillet 2013

Week-end

Zongo, le 14 juillet, 8h42

 

Nous venons de finir de petit-déjeuner, les enfants commencent à arriver dans le Hangar. Depuis notre arrivée, le petit-déjeuner (no-soaka) est composé de pain, dosettes de Nescafé et sachets de thé noir aromatisé achetés chaque matin,  et de la margarine et lait concentré acquis au premier jour. Evidemment, il n’y a pas de réfrigérateur ici, le beurre et le lait sont donc pour nous une petite aventure quotidienne (« à votre avis, on en mange jusqu’à quand ? » « Jusqu’à ce qu’on soit malade !»).  Mais avant de se restaurer, chacune se doit de passer par la « cabine de douche ». Nous avons en effet été injustes de ne pas mentionner cette dernière jusqu’à lors, cette erreur se devait d’être réparée : il y a bel et bien un lieu dédié à la douche dans notre habitation. Cette petite pièce, collée aux latrines, est composée…d’un trou dans le sol, les murs y sont nus (ça vous rappelle les « toilettes » ? C’est normal). Le but étant d’y entrer avec un seau d’eau pour se décrasser (la pièce ferme à clé). Les photos seront sans doute plus explicites. Certains se demanderont donc pourquoi nous préférons nous laver dans notre « salon » le soir, l’explication est très simple : dès la tombée de la nuit, les cafards (nourris aux OGM, apparemment) envahissent les deux pièces susnommées, et même si « les filles, les cafards ne vous prendront pas un bout de fesse hein ! », ça ne reste tout de même pas très agréable comme cohabitation.

Bref, nous sommes donc dimanche, et si le rythme de vie ici nous paraissait lent par rapport à notre mode de vie occidental, c’est que nous n’avions pas encore vécu un week-end à Zongo. Non pas que l’on s’y ennuie, mais les horaires n’existent pas ici, pas plus que les programmes vraiment structurés que nous impose le CEFISE : si on est fatigué, on s’étend, si on a besoin d’eau, on va à la fontaine, si la nourriture manque, on fait un tour au marché. Le repas de « midi » se fait généralement vers 15h (donc 17h en France), ce qui fait que nous ne mangeons pas le soir. Les premières pertes de poids ont d’ailleurs été constatées avec un certain plaisir. Si les enfants viennent (ou plutôt : quand les enfants viennent), on improvise des jeux, ou des « exercices » : il y a un temps pour tout, mais ce temps n’est pas clairement défini. Quelque chose dont nous n’avons pas l’habitude, en sorte !

La vie ici, vous vous en doutez, n’est pas toujours simple : nous nous rendons vraiment compte de la précarité dans laquelle nos amis et leur village évoluent.  La dénutrition, la pauvreté, les maladies : ces gens, bien que touchés par tous ces fléaux, font face avec philosophie, sans jamais se plaindre, et restent dignes en toutes circonstances. Ici, on vit au jour le jour, tout dépend du nombre de francs CFA trouvé dans les poches. Antoine Onadja a, depuis hier, contracté le palu : une habitude, par ici. Là où nous, françaises, serions clouées au lit sans pouvoir bouger, lui se meut sans montrer ses souffrances (pourtant réelles), nous répétant qu’il a l’habitude. Et ces enfants, qui courent dans la boue, couverts de crasse, qui sourient pourtant chaleureusement dès qu’ils croisent notre regard…Des exemples comme ça, nous pourrions en trouver à la pelle. Nous nous rendons bien compte des difficultés de ces gens, même si en tant que « nassara », nous sommes forcément privilégiées ici : en démontrent les égards que l’on nous témoigne (deux repas, une chambre à nous, de l’eau couvrant nos besoins quotidiens). Etre spectatrices de telles souffrances tues est parfois pénible à vivre, les sentiments d’impuissance et d’inutilité doivent souvent être refoulés. Ces prises de conscience peuvent surgir à n’importe quel moment : à la vue d’une femme poussant un immense bidon d’eau sur des kilomètres, en plein soleil, ou à l’écoute des récits de nos amis sur les pertes d’êtres qui leur étaient chers. Evidemment qu’en venant ici, l’on s’attendait à relativiser. Mais même en s’y préparant, le choc est bien réel, et inévitable. Heureusement nous sommes toutes les trois, ensemble, et pouvons parler de nos ressentis dès que le besoin se présente : nous restons à l’écoute les unes des autres, et notre groupe fonctionne, que nos avis soient les mêmes ou pas, ce qui fait notre force ici. La fierté de nos proches joue également un rôle de moteur, et c’est avec le sourire aux lèvres que nous rendons leur salut aux enfants, et c’est avec émotion que nous prenons les bébés des femmes sur nos genoux quand celles-ci nous les confient. Notre aventure est avant tout humaine, et nous vivons là quelque chose que nous ne pourrons oublier.

Aucune d’entre nous n’est encore réellement tombée malade : quelques vertiges, maux de tête ou de ventre se sont certes inopinément invités, mais nos corps et organismes semblent pour l’instant s’adapter à la chaleur, aux privations et à la fatigue. Nous pouvons donc continuer nos découvertes plus ou moins sereinement, que cela soit au CEFISE ou à Zongo. Nous avons réussi à organiser un programme des trois prochaines semaines avec tous nos partenaires, programme qui contentera a priori tout le monde (du moins nous l’espérons).  C’est ainsi qu’hier après-midi (samedi), nous avons commencé à évaluer les connaissances des enfants parrainés de l’école Pouiwindin, afin de les classer en deux groupes de différents niveaux, dont deux d’entre nous aurons la charge les après-midi de semaine pendant que la troisième s’occupera de l’instruction des femmes. Le matin, Gwenaëlle a fait le bonheur des femmes en les prenant en photos avec leurs bébés et/ou enfants et en imprimant certains clichés pour en faire des dons aux mamans : beaucoup d’émotion et de joie, ponctuées par une chanson de remerciement. Antoine Onadja a ensuite exhibé un cadeau à notre attention : une superbe banderole saluant la réunion de nos associations respectives, quelques mètres de tissu qui nous ont beaucoup plu et touchées (voir photo), un partenariat dont nous ne pouvons que nous féliciter.

Le samedi soir, nous sortons faire quelques courses, et apprenons dans la foulée à répondre aux « nassara, nassara » des enfants : il suffit de crier « nissabalga !! » (= noir). Leurs têtes la première fois que nous crions cela mériteraient toute une pellicule photo ! Les femmes nous font des clins d’œil, nous nous intégrons de plus en plus. Après une petite marche jusqu’au tout début du village pour acheter de l’anti-moustique (les jambes d’Hélène et Marion sont des champs de bataille) et des poches de jus d’orange glacé (LE plaisir suprême), puis nous nous installons avec Antoine O et Augustin dans le Hangar. Nous parlons encore une fois un bon moment avec nos hôtes, différents débats en ressortent, dont un très intéressant sur l’homosexualité : selon Antoine O., si tu tiens la main d’une fille en en étant toi-même une, « tu te fais lapider !!! », même si selon la loi burkinabè ceci est un acte légal. Un grand moment d’effarement suit quand celui-ci apprend que le mariage homosexuel est maintenant autorisé en France : « mais vous n’avez plus de France, mes amies ! », et comment décrire son regard quand nous lui affirmons que nous pensons que c’est une bonne chose ! Après de longues minutes d’explication, Antoine accepte notre point de vue, semble le comprendre et le respecter. Il a l’air de réfléchir à nos paroles, ce qui démontre encore une fois la force de ces gens capable d’entendre d’autres avis que les leurs et de ne pas se braquer sur leurs opinions. Nous nous couchons assez tard, et parlons encore de notre journée longtemps après nous être mises au lit. Quand tout à coup résonne « pour que tu m’aimes encore » : Augustin possède une clé USB qu’il branche à sa vieille radio, mais jusque-là nous n’entendions que Bob Marley ou Tiken Jah Fakoli. Ce soir, quelle surprise de reconnaître une de « nos » chansons, que nous braillons donc de bon cœur, au beau milieu de la nuit, provoquant les rires des compères depuis le Hangar !

 

Ce matin (dimanche, donc), nous profitons donc de ce moment calme avant le rush de la semaine prochaine : nos prochaines journées seront remplies à bloc, mais nous y sommes prêtes. Hélène est partie à la messe avec Antoine Onadja (Antoine Sawadogo est absent pour quelques jours), pendant que Gwenaëlle et Marion écoutent (et massacrent) avec plaisir les chansons de Céline Dion, Natacha St-Pierre, Cabrel et autres chanteurs qu’Augustin passe en boucle sur sa radio (suivra un échange de musique, Augustin peut maintenant écouter Lady Gaga,Nightwish ou David Guetta) en parlant du simple bonheur que représente un lavage de pieds dans un seau d’eau savonneuse : relativiser, vous dîtes ?

A son retour, Hélène est conquise : la messe est tellement différente de celle dont elle a l'habitude ! Sans tomber dans le gospel, celle-ci est trés festive, dansante et chantante. La ouagaphonienne aura même droit à un Fanta ainsi qu'un plat de pâtes : une récompense divine ? Entre temps, Gwen était donc partie en moto avec Augustin, aprés qu'elle et Marion aient pu  rester bouche bée devant une tempête de sable inattendue et impressionnante, suivie d'une averse bienvenue, apportant un rafraichissement béni du climat (30 degrés, si si c'est frais !). 

La journée se passe en lecture pour les enfants (Marion et Gwen furent applaudie pour leur mise en scène), découverte pour les burkinabé des musiques françaises actuelles (et plus anciennes : voyage voyaaaaage !), confection d'un repas dégusté vers 17h (c'est plus long à cuire par ici, les coquillettes), et démonstration de "danse", le tout dans la joie et la bonne humeur. Ce message est ainsi envoyé d'un cyber café aux touches branlantes qui ne correspondent pas aux symboles gravés dessus (petite révision du clavier), où charger cinq photos prend approximativement 10 minutes (quand la page veut bien s'afficher) : la connexion du CEFISE semble déjà loin !

Nous souhaitons donc une bonne soirée à tout le monde, et sachez que nous n'oublions pas que si nous pouvons vivre tout cela, c'est grâce à vous.

 

Et toujours, les grosses nouilles à l’œuvre, rien que pour vous !

Catégorie « découvertes lexicales » :

« Vous avez vu, les mots « pluie » et « diarrhée » se disent tous les deux de la même façon en mooré (=saaga), vous croyez qu’ils ont fait un rapprochement ? »

 

Catégorie « je suis une future ortho mais je ne sais pas parler la France » :

« - (…) mais vous, par rapport à la cultivation…cultivation ? »

-hum, culture plutôt, non ? »

 

« -(…) Oui, c’est comme le protestianisme »

 -protestantisme, en fait »

 

Catégorie « je veux faire style que je parle le mooré couramment » :

« -Bon, c’est bon pour vous si on fait ça ? 

-neyyibéogo ! (=bonjour)

-…

-…

-Non mais en fait je voulais dire yel ka bé (=pas de problème)… »

 

Catégorie "pensées profondes" :

"Ca serait con si les habits se désintégraient quand même..."

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Commentaires
A
Eh ben les filles, ça a l'air de pas trop mal se passer !!!! Je suis vraiment contente pour vous et suis sure que ce séjour marquera vos esprits pour longtemps. Gardez votre belle énergie et sachez que vos récits et photos nous enchantent. <br /> <br /> Des bises à vous.<br /> <br /> annie.
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